Le naufrage de la gauche

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Mélenchon

 

En pleine crise sanitaire, alors que le président de la république sort du silence pour un nouvel exercice de com, manip et propagande, que nos libertés sont un peu plus entravées, il pou­vait sembler extravagant de consacrer cet édito au naufrage annoncé d’une gauche en perdi­tion intellectuelle, morale, et politique. En réalité les évènements des quinze derniers jours que d’aucuns préféreraient taire au nom de la priorité sanitaire, sont d’une importance majeure.

Enchainement des faits à la vitesse grand V

Trois évènements principaux :

Des enseignants ont été dénoncés publiquement, notamment par l’UNEF locale, comme « islamophobes », mis en accusation pour l’organisation d’un colloque et le contenu de leurs cours. Dérive d’une section syndicale de base ? La direction nationale de ce qui n’a plus grand chose à voir avec l’organisation syndicale étudiante que nous sommes quelques-uns à avoir pratiquée et construite dans notre jeunesse est venue rappeler que c’est bien l’UNEF dans son ensemble qui se trouve embarquée aujourd’hui dans une course folle islamophile, au nom de l’antiracisme évidemment, allant jusqu’à promouvoir des réunions non mixtes, ou encore des réunions interdites aux blancs.

  • Il y a eu ensuite Jean Luc Mélenchon.

Le leader de la FI apporte son soutien aux groupes de paroles séparés, défendant les réunions dans lesquelles les blancs sont tenus à l’écart, notamment pour évoquer des sujets subis par les noirs, les arabes ou les jaunes ou… C’est ainsi que dans cette conception de l’antiracisme les blancs sont réduits au rang d’esclavagistes, les noirs et autres à celui d’esclaves. Que dirait-on si les blancs organisaient des réunions interdites aux noirs ? La substitution de la couleur de peau aux réalités sociales, la lutte des races contre la lutte des classes avait déjà été entreprise par Daniele Obono soutenue alors par Jean Luc Mélenchon lorsque je me permettais de souligner cette dérive communautariste et indigéniste de la député insoumise. Tout était déjà dit sans que curieusement grand monde à l’époque ne s’en émeuve.

  • La cerise sur le gâteau se nomme Audrey Pulvar.

Voilà l’adjointe d’Anne Hidalgo qui vient apporter sa contribution à la liquidation de toutes les traditions universalistes portées durant des décennies par la gauche en revendiquant des réunions dans lesquelles les blancs pourraient être présents, à condition de se taire.

Un triple naufrage

Nous assistons là à un triple naufrage

  • Ce naufrage est d’abord intellectuel.

Cette gauche abandonne les traditions de la gauche républicaine pour se ranger dans le sillon de la gauche woke américaine, racialiste, communautariste, islamophile. Ces positions et théories sont contraires aux intérêts aussi minimes soient-ils des travailleurs et salariés. Loin d’unir elles divisent. Loin de permettre l’action commune, elles isolent.

  • Ce naufrage est aussi moral.

L’universalisme républicain, le refus les clivages basés sur la couleur de peau, sur les communautés, sur le sexe, sont de fait balayés. Cette gauche là est complice de ceux qu’elle prétend combattre à longueur de communiqués, l’extrême droite notamment, ou la droite, qui peuvent ainsi se draper dans la défense des principes délaissés.

  • Ce naufrage sera enfin politique et électoral.

Le souci clientéliste de Mélenchon, Pulvar et sans doute quelques autres leur réserve des déconvenues cataclysmiques. Car ce qui fonde le citoyen n’est pas la différence inscrite dans la couleur de peau mais dans une communauté d’intérêts sans discrimination, qui réunit quelle que soit leur couleur les travailleurs et salariés contre le capital dont les représentants aussi, soit dit en passant, sont également de toutes les couleurs.

En réalité, cette gauche qui substitue la lutte des races à la lutte des classes, le sociétal au social, ne peut plus être d’aucun secours pour les millions d’ouvriers, de salariés, de jeunes, de retraités qui cherchent à se défaire du joug du capitalisme.

Le vide est là.

Ne serait-il pas temps, dans la période actuelle, que les groupes, militants, citoyens attachés à une république démocratique, laïque et sociale, se rassemblent par delà leurs différences pour élaborer les propositions aptes à regrouper sur une base programmatique suffisamment large et claire qui réponde à la crise du capitalisme qui plus que jamais ne va épargner per­sonne ?

Jacques Cotta
Le 1er avril 2021

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