Le grand Reset des luttes populaires

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 Par le Parti de la démondialisation

Macron tweetait en novembre 2020 : « Les destins d'un habitant de Rio, Lagos, Canberra, Vienne, Paris, Dakar n'ont jamais été si liés qu'aujourd'hui. Santé, climat, inégalités, valeurs universelles : nous avons besoin d’un consensus mondial, d'une même lecture du monde, d'unir nos efforts pour bâtir ensemble ». Une belle coordination avec le Forum économique mondial (le Davos), organisé chaque année par et pour les grands manitous de la finance et des multinationales, qui se tiendra à Singapour du 17 au 20 août 2021.
« Le great Reset » : tel en est le thème majeur. Ni plus ni moins que la volonté de passer à une nouvelle version du capitalisme, une « quatrième révolution industrielle », celle de l'automatisation des machines par l'intelligence artificielle et la généralisation des "énergies vertes". C'est elle qui, en grande partie, mènerait à « un monde plus vert, plus juste et plus prospère », selon le Forum économique mondial.
D'ailleurs, « crises » ou pas, Macron poursuit sa mission sans vergogne. Il le revendique. Fin janvier 2021, il s’adressait aux grands patrons étrangers pour les rassurer : « Nous ne ralentirons pas la réduction de l’impôt sur les sociétés, qui sera ramené à 25 % l’an prochain. Nous ne renoncerons pas à la suppression de l’ISF. Et nous réduisons les impôts de production de 10 milliards d’euros par an, ce qui est sans précédent », déclarait-il en anglais en ouverture d’une réunion en vidéoconférence « Choose France » pour promouvoir l’attractivité française… Pour être encore mieux compris, il ajoutait « Nous avons passé des réformes, nous sommes en train de prendre des mesures supplémentaires et nous continuerons à réformer le pays afin de le rendre plus compétitif ».
Face au pilonnage systématique et accéléré des biens publics, à la paupérisation de l’État, au mépris de la nation et du peuple, à l’augmentation de la captation des bénéfices du fruit du travail des salariés et des centaines de milliers d’auto-entrepreneurs exsangues, quel est le rapport de force mis en œuvre par les organisations syndicales, toutes membres de la Confédération européenne des syndicats (CES) ? Tandis que s’empilent les réformes gouvernementales, toutes inspirées par le néolibéralisme mondialisé et toutes issues de l’Union européenne, les résistances sont au point mort. La colère est là, grandissante, à la base, tapie chez une grande majorité des Français. Mais aucune structure syndicale, ni politique, ne mène de combat gagnant. Avant ou pendant le Covid, rien ne change. Rituels défilés et grèves sporadiques continuent, sans avancées pour les classes dominées. Comme si une tragicomédie immuable paralysait ces organisations qui se définissent pourtant au service des travailleurs !

Alors, y’a urgence à organiser un « Grand Reset », une énorme réinitialisation des modes d’organisation de résistance et d’action de celles et ceux qui n’en peuvent plus. Car la 4e révolution conceptualisée par le Davos n’est ni plus ni moins que l’annonce de la main mise sur les sociétés, qualifiées de dépassées, pour leur substituer LA société. Une et unique : celle d’une poignée de détenteurs de capitaux, de moyens de production, de distribution, de médias et de contrôleurs du bien et du mal, « d’experts du bien vivre correct ». L’humanité réduite à une automatisation de la vie. Tel est le projet délirant de quelques hyper puissants. Rien de complotiste à penser cela. Une simple lecture des faits et des déclarations suffit à le comprendre.

L’article que nous publions ci-dessous, concerne la responsabilité des directions syndicales françaises dans les échecs répétés depuis des décennies. Nous n’oublions pas que l’espoir n'a resurgi qu'avec l’entrée en scène des Gilets jaunes. Nous en reparlerons plus tard.

Lorsque nous regardons la situation de notre pays, nous ne manquons pas d'être très troublés par un paradoxe saisissant !
D'un côté, un peuple accablé par la montée du chômage, par l’augmentation de la précarité et de l’insécurité sociale, par la baisse des revenus, par la perte de sa souveraineté, par le déluge de réformes réduisant sa liberté et ses droits à peau de chagrin, et, de l’autre côté, l'impuissance du mouvement syndical et social. Alors que la colère gronde, que le terrain de la révolte est fertile, et même plus fertile que jamais, les organisations qui prétendent le représenter et lutter dans l'intérêt des classes populaires se caractérisent par une faillite totalement dramatique !

Comment cela est-il possible ? Comment s'expliquer que les classes dirigeantes, qui forment une minorité, peuvent réussir à maintenir bâillonnée la majorité du peuple ? Comment ce peuple peut-il supporter qu'on le fasse revenir au XIXe siècle, après les grandes batailles sociales et politiques qu'il a menées et gagnées ? Les conquêtes sociales et politiques qu’il a arrachées aux possédants ? Comment peut-il tolérer que les milliardaires aient augmenté leurs fortunes de 479 milliards de dollars en une seule année (dernier rapport d’OXFAM), et que les actions rapportent de plus en plus aux parasites ? Comment la Macronie et ses suppôts peuvent-ils obtenir de lui qu'il reste confiné, discipliné, et silencieux (l’Académie de médecine lui ordonnant même de se taire dans les transports en commun) dans ses quartiers populaires où on l'exile depuis plus de 50 ans, alors que les privilégiés s'installent dans les centres villes et ou leurs spacieuses et luxueuses résidences secondaires avec leur domesticité ? Comment expliquer que les salariés, les commerçants et artisans, les restaurateurs, les gens du spectacle et de la culture acceptent la situation qui leur est faite ?

Peuple dominé et silencieux : pourquoi ?

La première explication, comme l'arbre cachant la forêt, est le fait du gouvernement qui règne par la peur. Nous le subissons aujourd’hui avec la crise sanitaire. Le pouvoir macronien tente - avec succès pour l'instant - de détourner la lutte contre l’épidémie de Covid 19 en l’instrumentalisant, pour accélérer la destruction de tous les acquis sociaux et politiques de notre peuple. Il ferme les universités car il craint les étudiants, il ferme tous les lieux de culture et de spectacle car il craint les masses, il ferme les restaurants, les bars et les brasseries car ce sont des lieux de discussion et de contestation, des lieux d'échanges citoyens, des espaces de sociabilité, donc dangereux pour lui. Il manie les couvre-feux et les confinements car cela est commode pour enfermer tout un peuple, l'empêcher de manifester, de se réunir et de contester ce régime. Il déclare l'état d'urgence prolongé pour mieux réprimer les citoyens qui auraient envie de protester et il « confine ». Car, sous couvert d’une pseudo-science reine, il prétend que seul le vaccin « résoudrait tout ». La Macronie a choisi de ne pas isoler et traiter les malades, mais d’enfermer le peuple car la destruction industrielle et celle des services publics poursuivies depuis 40 ans, tous gouvernements confondus, a privé le pays de masques, de gants, de tests, de lits de réanimation, de respirateurs, de personnels qualifiés, de médicaments, et maintenant de vaccins ! La France qui s'enorgueillit d’avoir un Institut Pasteur éminent n'est plus capable de produire le vaccin tant attendu. Qu'importe, elle l’achète par l’intermédiaire, inutile, de « l’Union » européenne. Les affaires sont les affaires… Même s’il ne reste plus à cette bourgeoisie compradore*, volontairement soumise à ses maîtres anglo-saxons et allemand, que le moyen moyenâgeux du confinement massif !
D’autant que cette bourgeoisie parasite a des soutiens : tous les partis du paysage politiques figé que nous connaissons, plus occupés à préparer les élections régionales et celles de 2022 qu'à faire des propositions, pourtant urgentes, pour sortir le pays de ce cumul de crises qui s’alimentent les unes les autres : sanitaire, économique, sociale, institutionnelle, sociologique, psychologique, environnementale, culturelle et donc politique.

La deuxième explication est donc masquée par la première. Il ne faut pas pour autant craindre de la traiter. Nous le disons tout net : les directions des organisations syndicales et politiques, dans leur écrasante majorité, sont désormais subordonnées au système capitaliste néolibéral qu’elles dénoncent parfois dans de beaux discours mais qu’elles ne veulent pas réellement abattre. Mobilisées, elles ne le sont que pour tenter d’amender le capitalisme, « négociant » avec l’ennemi de classe (les dirigeants d’entreprise et les gouvernements néolibéraux). Ainsi sont-elles en position de faiblesse ne pouvant qu’aller d’échecs en échecs, satisfaisant l’ennemi qu’elles sont supposées combattre. Elles se donnent bonne conscience et alimentent ce qu’il faut bien appeler leur « fonds de commerce ».

Depuis 40 ans, malgré des mobilisations à la base, parfois très fortes, les salariés vont de reculs en défaites. Bien sûr, une poignée de salariés, extrêmement combatifs et déterminés, arrachent (heureusement !) quelques victoires ponctuelles mais, pour la grande masse des salariés, les salaires et les droits reculent. Car les directions syndicales ne font qu’appliquer une tactique perdante, qui sert objectivement de « soupape de sécurité » au patronat, consistant à mener des luttes en silos, en ordre dispersé, décourageant les salariés, Chaque silo lâchant le surplus de vapeur par secteur pour que la totalité de la cocote du système capitaliste n'explose pas ! Illustrations récentes : le 11 janvier, les professions médicales, le 16 janvier, manifestation contre le projet de loi contre la "sécurité globale", le 26 janvier, grève de l'éducation nationale, le 28 janvier, "journée d'action" contre les licenciements, le 4 février, "journée de mobilisation interprofessionnelle"... Cette stratégie empêche la fameuse « convergence des luttes » tant ressassée mais évitée dans les faits. Les journées "saute-mouton" et les promenades "traîne-savates" de Bastille à République sont aussi vaines qu'inefficaces et démobilisatrices ! Ce ne sont que des « barouds de déshonneur » et des leurres qui ne servent qu'à camoufler l'essence contre-révolutionnaire des syndicats réformistes.

Les centrales CFDT-CGT-FO-CFTC-UNSA sont devenues volontairement les otages de la Confédération européenne des syndicats (CES) totalement contrôlée par la bureaucratie européiste. Aucune d’entre elles n'a la volonté de remettre en cause le système européen néolibéral qui a mis la main sur notre pays. C'est ainsi que les luttes sont dirigées vers des voies de garage. La CES, (89 syndicats européens et 10 fédérations) n'est que la courroie de transmission de la Commission européenne. La CES n'a jamais vraiment soutenu les luttes car elle est en plein accord avec l’Union européenne, l'euro et l'OTAN. Elle est atlantiste et n'a jamais contesté l'annexion par l'UE des PECO (Pays de l'Europe du Centre et Orientale). Tous les syndicats français - y compris la CGT - sont adhérents à la CES, dont Laurent Berger (CFDT) est l'actuel secrétaire général, : le DGB allemand, la FGBT belge, l'UGT espagnole, les CGT-CFDT-FO-UNSA-CFTC français, Solidarnosc polonais, etc.
On ne peut que déplorer que la CGT française ait adhéré à la CES en 1999, après un travail réformiste de fond conduit par Thibault et Lepaon. Ce faisant, elle a choisi une stratégie d'accompagnement du capitalisme néolibéral. Pire, la CGT, comme ses « rivales », accepte « l'horizon indépassable » du capitalisme multinational financiarisé, l'UE et l'euro et toutes les directives européennes ratifiées par la CES. D'ailleurs, il est caractéristique de constater que les tracts syndicaux qui appellent à la mobilisation contre le projet Hercule (EDF) ne dénoncent pas l’Union européenne et les directives énergie, qui sont pourtant à l’origine de la mise à mort d’EDF voulue par l'UE. Rappelons-nous que les PTT et la SNCF ont subi le même sort.

Face aux politiques néolibérales exigées par l’UE, appliquées par Macron et acceptées par les directions syndicales, il est vital que les syndiqués de base, les salariés et le peuple tout entier - comme ont su le faire les Gilets Jaunes - prennent les choses en main ! Repolitiser le syndicalisme ouvrier, l’arrimer aux besoins sociaux, économiques, démocratiques du peuple n’est pas un supplément d’âme. Il est constitutif de la lutte des classes que seul, actuellement, le patronat continue de mener. Ainsi a-t-il mis toutes les chances de son côté pour gagner, encore et encore. La question est donc bien pour les classes dominées de construire un nouveau rapport de forces favorable à la défense de ses intérêts. Et dans cette perspective les directions syndicales ne sont pas des atouts mais des obstacles. Les preuves sont accablantes. Cessons d’en être affligés. Passons à l’action ! Organisons un "grand reset" des luttes.

* La bourgeoisie compradore désigne la classe bourgeoise qui, dans les pays dominés, tire sa richesse de sa position d'intermédiaire dans le commerce avec les impérialismes étrangers, par opposition aux bourgeois ayants des intérêts dans le développement de l'économie nationale.