Souveraineté et démocratie ou mondialisation et régime autoritaire ?

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Communauté européenne d'Alsace

VOEUX 2021

Par Michèle Dessenne, présidente du Parti de la démondialisation

Allons à l’essentiel pour l’année qui s’ouvre. Les priorités absolues se nomment souveraineté et démocratie contre mondialisation et système autoritaire. Ou autrement dit : Brexit contre Collectivité européenne d’Alsace. On vous explique.

C’est à la même date symbolique, le 1er janvier 2021, que le Royaume Uni a commencé sa sortie opérationnelle de l’Union européenne et que, de l’autre côté de la Manche, est née la Communauté européenne d’Alsace (CEA). Ainsi, tandis que les Britanniques débutent la mise en œuvre du retour à leur souveraineté, les Français subissent une nouvelle fois un déni démocratique avec la création d’un Ovni institutionnel préfigurant la loi 4D : des lois à la carte ! « C’est une révolution institutionnelle, avec une prise en compte de nos spécificités », affirme l’ancienne présidente du conseil départemental du Haut-Rhin, Brigitte Klinkert, actuelle ministre de l’Insertion.

A première vue il n’y aurait pas de rapport entre les deux événements et pourtant tout démontre le contraire. Tandis que le Royaume Uni signe (enfin) un accord avec l’Union européenne pour pouvoir en sortir (sic), qu’elle reprend donc sa souveraineté redonnant à son parlement sa pleine capacité à décider de ses lois, voilà que surgit en France un Ovni : « une communauté européenne d’Alsace », décidée à l’écart du peuple, bafouant le résultat du Référendum de 2013 : un non à l’unification des départements du Haut-Rhin et du Bas Rhin…
Cette opération a été préparée de longue date mais en toute discrétion médiatique. Elle n’a suscité aucun article dans la presse et pas plus de déclaration du gouvernement, des sénateurs et des députés qui l’ont pourtant votée en 2019 (1). Comme s’il leur avait semblé préférable de faire profil bas pour ne pas s’attirer les foudres des opposants potentiels à cette « innovation » qui, en réalité, s’inscrit dans la droite ligne de la logique des réformes de pseudo décentralisation conduites par Hollande, puis par Macron : réduction du nombre de régions (de 22 à 13), création des métropoles, développement des eurorégions, fusion de communes, etc.
La CEA apparaît ainsi comme une étape vers la future loi 4D qui sera présentée en Conseil des ministres début février 2021. On y reviendra. Ne voyez pas là un syndrome de complotisme de notre part : ce sont les promoteurs eux-mêmes qui se réjouissent de la filiation entre la CEA et la prochaine loi 4D - décentralisation, déconcentration, différenciation et décomplexification - (2). La preuve : « La Collectivité européenne d’Alsace (CEA) préfigure ainsi la loi 4D sur la différenciation portée par Jacqueline Gourault », se félicite Brigitte Klinkert, ministre déléguée à l’Insertion. Elle précise, au cas où on n’aurait pas compris, que « La Collectivité européenne d’Alsace, voulue par le président de la République, va devenir un laboratoire de la décentralisation et un laboratoire européen pour la France ». D’ailleurs il se dirait que la Bretagne trépigne d’accéder à ce même régime  particulier.
Le logo de l’Ovni institutionnel (et politique bien sûr) annonce la couleur du qualificatif «  européenne » : les étoiles jaunes sur le drapeau bleu scintillent et forment un cœur avec le rouge de l’Alsace et l’adresse internet de la CEA parle d’elle-même : www.alsace.eu

Dotée de nouvelles compétences (3) particulièrement croustillantes, notamment la coopération transfrontalière, le bilinguisme et l'enseignement de la langue régionale, le tourisme et le développement, le transport et les mobilités (en plus des routes départementales, les routes nationales et les A35 et A36), la culture, le patrimoine régional, la vie associative... la CEA, désormais chef de file de la coopération transfrontalière (Allemagne et Suisse), pourra agir entre autres dans le domaine de la santé, par exemple les EHPAD…
La CEA qui fera la promotion de la « Marque Alsace » nous fait donc entrer (en douce mais pas en douceur) dans le nouveau « monde », briseur de nation avec des lois à la carte sur le territoire national. C’est bien l’euro-régionalisme qui poursuit sa percée !
Vous avez été consultés, citoyens, citoyennes, pour la création de la CEA ? Non, évidemment puisque vous aviez mal voté en disant non lors du référendum de 2013 à la fusion des départements !

En même temps, le Royaume Uni largue les amarres de l’Union européenne

Pendant ce temps, de l’autre côté de la Manche, un mouvement inverse s’opère. Les Britanniques, qui ont voté par référendum à la sortie de l’UE, entrent dans la dernière phase de libération de la tutelle de l’UE. Certes des compromis ont été concédés par le Royaume Uni, notamment sur la pêche. Plus de 1 200 pages pour ce « deal » après plus de 4 ans de discussion (merci l’article 50 qui « organise » la sortie d’un pays de l’UE…). Mais, last but not least, l’Union européenne a fléchi devant la détermination britannique et a dû lâcher du lest. Comble de l’ironie, elle a fini par se réjouir du résultat après avoir tant et tant menacé, trépigné, dénigré, moqué… Non seulement le processus est concrètement enclenché mais plus rien de permettra de revenir en arrière. L’acte concret des Britanniques démontre qu’un pays déterminé peut aller jusqu’au bout pour se libérer de l’UE supranationale. Oui, bien sûr, me direz-vous, le Royaume Uni n’était pas ficelé par l’euro, car il avait préservé son indépendance monétaire, ce qui n’est pas le cas de la France, toute soumise par la volonté de tous les gouvernements, notamment depuis le Traité de Maastricht (1992) et par l’adoption du Traité de Lisbonne en 2008 par le Congrès (un véritable coup d’Etat parlementaire !). Pour nous, la France, le chemin sera plus escarpé, la bataille âpre nécessitera notre absolu engagement. Et alors ? Est-ce que la difficulté doit nous faire peur ? Nous faire plier l’échine ?
Comme l’écrivait René Char, poète, compagnon du Mouvement surréaliste et Résistant les armes à la main pendant l’Occupation allemande, « Le réel quelquefois désaltère l'espérance. C'est pourquoi, contre toute attente, l'espérance survit. » Ironie, en effet, c'est en pleine période du règne de Macron, le meilleur valet de l’Union européenne et le pire destructeur de la nation française que nous ayons jusqu’à maintenant subi, que la première fracture se produit. Les 28 sont désormais 27. Déjà objet de défiance, l’Union européenne pâtit désormais de son absence d’actions pertinentes face à l’épidémie de Covid. Envolée la chimère de l’Europe sociale, de la solidarité entre pays…
La gestion de la Covid-19 qui a percuté la vie de tous les Français, a mis en lumière les effets du choix politique néolibéral, de la mondialisation, privant notre pays de toute capacité à fabriquer et distribuer les produits essentiels pour soigner. Les choix des gouvernements en faveur de la désindustrialisation, des délocalisations, du libre-échange, du low cost ont livré notre sort à des puissances étrangères en matière de médicaments et d’équipements, tandis que se menait tambour battant la réduction des effectifs et des moyens des hôpitaux publics au nom de la doxa moins de dépenses publiques, etc. Nul ne peut aujourd’hui ignorer cette réalité. Et nul ne peut plus défendre cette vision de l’économie et du rôle de l’Etat sauf à être un traitre à la France, à son peuple, à son histoire. Les gesticulations présidentielles hagardes et erratiques, conjuguées à l’autoritarisme et au tout sécuritaire finiront bien par montrer le roi nu ! Et à redonner force et confiance à notre peuple pour relever la tête. Déjà les Gilets jaunes avaient montré la voie.
Macron nous prévient. Il y aura du sang et des larmes avant la fin de son mandat. Il veut aller au bout de sa mission. Comme il l’a annoncé dans son interview sur Brut : « Peut-être que je ne pourrai pas être candidat, peut-être que je devrai faire des choses dans la dernière année, les derniers mois, qui seront dures parce que les circonstances l’exigeront et qui rendront impossible le fait que je sois candidat, je n’exclus rien ».

Nous non plus n’excluons rien et surtout pas l’essentiel. Il faut choisir. Entre souveraineté du peuple et subordination au supranational. Entre souveraineté nationale et démembrement de la France. Faisons de 2021 l’année de la défense de la nation et de nos libertés et créons les conditions de notre libération commune. Nous pourrons alors prendre les décisions qui s’imposent pour que se rallument les Lumières.

N’oublions pas. N’oublions rien. Nous avons déjà dit non en 2005 (Traité constitutionnel européen). A contrario de toutes les prévisions sondagières. Le peuple français peut encore dire non si un référendum pour ou contre la sortie de l’Union européenne est organisé. Agissons en ce sens. En regroupant nos forces sur l’essentiel. C’est au peuple de trancher. C’est sa voix qui doit tracer l’avenir. Il est seul légitime à changer nos institutions, notre Constitution.

Pour que vivent la Liberté, l’Egalité, la Fraternité, et la Laïcité sans laquelle la souveraineté nationale et populaire ne saurait pleinement exister !

1. https://www.legifrance.gouv.fr/download/pdf?id=r_Yp2IyiVbVX4dzpuM3MhO-nam6aCtsgM2LdqywZyGE=
2.https://www.publicsenat.fr/article/parlementaire/decentralisation-transferts-de-competences-jacqueline-gourault-detaille-la-loi
3. La CEA, chef de file en matière de coopération transfrontalière, tourisme et développement, reprend toutes les compétences des départements auxquelles s’ajoutent des compétences spécifiques et acquièrent des compétences nouvelles : https://www.alsace.eu/ma-collectivite/les-competences/