Faut-il voter pour François Asselineau (Union populaire républicaine – UPR) ?

Par le Parti de la démondialisation (Pardem)

Le 13 mars 2017.

Le candidat du Parti de la démondialisation à l’élection présidentielle, Jacques Nikonoff, n’a malheureusement pas obtenu les 500 parrainages requis. Censuré dans les grands médias, comme d’autres candidats, il n’a pas pu faire connaître son programme et ses idées aux Français. Il n’y a donc aucune raison pour que le Pardem appelle à voter pour un autre candidat au premier tour le 23 avril. En effet, si le Pardem a tenté d’obtenir les parrainages pour son candidat, c’est bien parce qu’il estime que l’offre politique n’est pas à la hauteur, et que son projet de démondialisation est un apport absolument décisif. Doit-il appeler à voter pour un autre candidat au premier tour de la présidentielle, le 23 avril ? Oui si ce vote fait avancer la cause de la démondialisation, c’est-à-dire un affaiblissement de l’ordre néolibéral mondial pour résoudre les problèmes des Français, et d’abord celui du chômage. Non dans le cas inversel.

 

Le Pardem s’est expliqué en détail sur ce sujet dans un texte diffusé le 27 mars 2017 et intitulé « Pour qui voter le 23 avril 2017 ? » :

http://www.pardem.org/presidentielle-2017/647-pour-qui-voter-le-23-avril-2017

Le débat télévisé du 4 avril sur les chaînes BFMTV et CNews, avec les onze candidats du premier tour de la présidentielle, aura été relativement bien réussi et très utile. Nous en avons tiré une analyse dans un texte diffusé le 6 avril et intitulé « Après le débat du 4 avril pour qui voter ? » :

http://www.pardem.org/presidentielle-2017/654-apres-le-debat-du-4-avril-pour-qui-voter

  • Nous ne pouvons évidemment pas appeler à voter pour Messieurs Hamon ou Fillon, représentants des partis duettistes de l’alternance. Ils se repassent le pouvoir depuis des décennies pour faire à peu près les mêmes politiques catastrophiques. Avec une mention spéciale pour Monsieur Fillon, un escroc qui aurait dû se retirer.

  • Ne parlons pas de Monsieur Macron, créature purement médiatique fabriquée et vendue par les milieux de la haute finance grâce aux grands médias dont ils sont les propriétaires. C’est un mélange de François Hollande et d’Alain Juppé.

  • Nous n’incluons évidemment pas Madame Le Pen dans nos hypothèses d’appel à voter, bien qu’elle évoque la sortie de l’euro et de l’UE. Son comportement nous est en effet insupportable, car le FN alimente le racisme, divise les Français, affaiblit leurs résistances face aux classes dirigeantes mondialisatrices. Quant à sa volonté de sortir de l’euro et de l’UE nous avons montré, à de multiples reprises, que ce n’était qu’un rideau de fumée.

  • Nous n’incluons pas les candidats d’extrême gauche Monsieur Poutou (NPA) et Madame Arthaud (LO) qui, traditionnellement, sont contre la sortie de l’euro et de l’UE, contre des mesures protectionnistes, contre la souveraineté nationale… Ils l’ont réaffirmé lors du débat télévisé du 4 avril.

  • Enfin nous ne pouvons pas appeler à voter pour Monsieur Lasalle, malgré toute la sympathie qu’il inspire, car son projet n’envisage à aucun moment la reconquête de sa souveraineté par notre pays.

Les seuls candidats pour lesquels nous pourrions éventuellement appeler à voter le 23 avril sont Messieurs Asselineau, Cheminade, Dupont-Aignan et Mélenchon. Ils manifestent, chacun à leur manière, des intentions de reconquête de notre souveraineté, certains affirment vouloir sortir de l’euro et/ou de l’Union européenne, ou de l’OTAN. Nous avons donc analysé en profondeur la démarche et les programmes de ces quatre candidats pour vérifier qu’ils ont bien pris la dimension des problèmes et de ce qu’il faut faire, qu’ils ciblent bien le principal pour gagner, que voter pour eux serait faire un pas vers la démondialisation. Nous avons rédigé une analyse complète pour chacun d’eux :

 

 

La qualification de François Asselineau pour l’élection présidentielle constitue une surprise de cette campagne. Nul n’avait envisagé cette hypothèse, ni les instituts de sondages, ni les journalistes, ni les experts en sciences politiques, ni les autres partis politiques. Son mouvement, l’Union populaire républicaine (UPR), avec 18 000 adhérents revendiqués après 10 ans d’existence, dépasse par exemple le total des effectifs cumulés du NPA, de LO et de EELV. Il serait temps que les journalistes et experts en sciences politiques et en sociologie se penchent sur le phénomène, sans le caricaturer, et tentent de le comprendre. Au moment où une sorte de consensus s’est établi sur l’idée que la « forme parti » était dépassée, il est réjouissant de constater que des citoyens s’engagent ainsi. D’autant que leur engagement, qualifié avec mépris de « populiste », comme le Pardem, témoigne d’un fort attachement à notre pays et de la volonté de rompre avec les chaînes qui l’entravent, situées, pour eux, essentiellement à Bruxelles.

Pour décider si le Pardem pouvait appeler à voter pour François Asselineau, comme nous l’avons fait pour Jacques Cheminade, Nicolas Dupont-Aignan et Jean-Luc Mélenchon, nous avons étudié dans le détail la « Charte fondatrice de l’Union Populaire Républicaine » et son programme présenté par François Asselineau en décembre 2011 pour l’élection présidentielle de 2012, toujours en vigueur en 2017, le « programme de Libération : 20 points pour rétablir la démocratie ». C’était le seul document programmatique accessible sur le site de l’UPR au moment de cette analyse. Nous souhaitions également accéder aux statuts de l’UPR et comptes rendus des congrès. Nous avons peut-être mal cherché mais nous n’avons rien trouvé. Or les statuts d’une organisation en disent beaucoup sur une structure et ses modes de fonctionnement, et notamment sur les relations entre les dirigeants et les dirigés. Quant aux congrès, ils permettent aussi de suivre les débats et les textes adoptés. Dommage !

 

Résumé

Après une analyse approfondie des documents de l’UPR, nous arrivons à la conclusion que nous ne pouvons pas voter pour François Asselineau à l’élection présidentielle, ni pour les candidats de l’UPR aux élections législatives.

La raison principale tient au fait que François Asselineau veut « Réussir l’alliance entre le capital et le travail. » Ce serpent de mer est un vieux slogan de la droite qui vise à désarmer le monde du travail face aux classes dominantes qui possèdent le (grand) capital. C’est pourquoi les mots « capitalisme », « classes sociales », « néolibéralisme », « mondialisation néolibérale », « démondialisation » ne figurent pas dans sa charte ni dans son programme. Dès lors, son analyse des causes des misères du monde et de la France est erronée, les propositions qu’il formule sont inefficaces et ne peuvent conduire qu’à l’échec. Comme il ne veut pas reconnaître l’opposition structurelle des intérêts entre les classes dominantes et les classes dominées, ainsi que leur conflictualité nécessaire, il ne s’attaque pas aux classes dominantes pour les affaiblir, ce qui est le but de la démondialisation dont fait partie la sortie de l’euro et de l’UE. Il s’inscrit ainsi dans le cadre de l’ordre néolibéral mondial.

1.- Son silence sur l’existence d’une mondialisation néolibérale le conduit à une erreur de diagnostic fatale sur l’origine du délabrement de la France et de la géopolitique mondiale. Certes, François Asselineau affirme la nécessité de la souveraineté nationale, mais il n’évoque jamais la nécessité de la rupture avec les politiques néolibérales qui sont pourtant la cause de toutes les difficultés. C’est pourquoi son projet ne peut qu’échouer, provoquant une nouvelle déception chez ceux qui se seraient laissés tromper.

2.- Sa conception limitée de la souveraineté ne concernant que l’euro, l’Union européenne et l’OTAN, lui fait oublier les autres institutions supranationales et la nécessité de la démondialisation. La France, avec lui, restera tenue en laisse. Il a choisi la voie la plus inefficace.

3.- Il propose de « Récupérer immédiatement notre siège plein et entier à l’Organisation mondiale du Commerce (OMC). » C’est-à-dire de se jeter dans la gueule du loup. À quoi sert de sortir de l’Union européenne si c’est pour rester dans le système libre-échangiste mondialisé ?

4.- Il accepte la globalisation financière puisqu’il ne consent qu’à quelques renationalisations de certains services publics, mais aucune entreprise stratégique et aucune banque. Nous sommes à des années-lumière des ambitions du programme du Conseil national de la Résistance dont il se réclame. On peut même parler d’escroquerie. Avec le programme de François Asselineau notre souveraineté économique n’est pas assurée, les entreprises ne sont pas libérées de la finance, les investisseurs non-résidents restent majoritaires dans le capital des entreprises à base nationale. Comment espère-t-il lutter contre la dictature de la finance ? Comment espère-t-il remettre les banques au service d’un financement sain de l’économie ?

5.- L’absence d’un véritable projet social et démocratique s’explique car François Asselineau a choisi le capital contre le travail. Son programme n’a aucun rapport avec le programme du CNR bien qu’il s’en réclame. Ce dernier invente la Sécurité sociale, accorde le droit de vote aux femmes, crée les comités d’entreprise… Face à cette ambition, le programme de François Asselineau est vide. Il n’a donc aucune chance d’entraîner dernière lui les classes populaires, son projet politique est mort-né. Il propose par exemple de « Relever immédiatement le SMIC à 1 500 € brut par mois » alors qu’il est déjà de 1 480,27 euros bruts depuis le 1er janvier 2017. Il n’y a strictement rien sur la réduction du temps de travail, ni sur l’abrogation de la loi Travail (El Khomry). Pour les retraites, il propose un « Arrêt immédiat de l’augmentation du nombre d’annuités (plafonné à 41) et du report de l’âge légal. » Le simple arrêt est notoirement insuffisant, il faut revenir aux règles sociales qui ont suivi la Libération : retraite pleine et entière à 60 ans avec 37,5 annuités dans le privé comme dans le public. À la lecture de ce programme on comprend pourquoi il n’y a rien sur la fiscalité, c’est-à-dire sur les modalités de la redistribution des richesses entre le capital et le travail. François Asselineau est indifférent au partage de la valeur ajoutée et au fait que ces 30 dernières années le capital a bénéficié d’un surcroît de richesses au détriment du travail. Cet état de fait, source majeure de la crise économique et sociale, nécessite une inversion qu’il ne veut pas engager. Il choisit le capital au détriment du travail.

6.- C’est la négligence totale des problèmes de l’environnement. De très rares propositions sont faites, qui n’auront qu’un effet très modeste sur l’environnement. Car François Asselineau refuse le protectionnisme et n’évoque pas le réchauffement climatique.

7.- C’est le scandale absolu du vide du programme de François Asselineau concernant le chômage pour lequel il manifeste son indifférence. Les questions de l’emploi, comme quelques autres, ne sont pas de son niveau, il renvoie vers le Premier ministre : « Que ce soit la fiscalité, l’emploi, les transports, la ville, les sports, les sujets de société, le tourisme, etc. Toutes ces compétences sont d’ordre gouvernemental et les choix résulteront des élections législatives. » S’il n’y avait qu’une seule raison de ne pas voter pour Monsieur Asselineau ce serait celle-là. Car on comprend que la sortie de l’euro et de l’Union européenne ne sont que des gris-gris, une marotte pour François Asselineau, et non le moyen de résoudre les problèmes dramatiques auxquels se confrontent les Français, dont principalement le chômage.

8.- Sa stratégie politique fondée sur l’homme providentiel est archaïque. Il dénigre les partis avec lesquels des convergences existent, son comportement est prétentieux et arrogant. Il privilégie le ralliement à sa personne plutôt que l’alliance sur un programme. Son mouvement apparaît comme un club de supporteurs à sa personne et non comme un véritable parti politique. Tout ceci est en parfaite contradiction avec l’expérience du Conseil national de la Résistance dont il se réclame. Son choix de privilégier l’élection présidentielle au détriment des législatives est très contestable.

9.- Il commet une erreur stratégique majeure en voulant utiliser l’article 50 du traité de Lisbonne pour sortir de l’UE. Il crée la confusion entre le BREXIT et le FREXIT. Si la procédure juridique qu’il évoque peut être utilisée par les Britanniques pour sortir de l’Union européenne, elle est en revanche totalement inadéquate pour sortir la France de l’euro. Sortir de l’Union européenne (sans l’euro) et sortir de l’euro sont des opérations très différentes. D’ailleurs, posons-nous la question suivante : s’il n’y avait pas cet article 50 dans le traité de Lisbonne, comment feraient les pays qui voudraient en sortir ? Ils ne sortiraient pas au motif qu’aucun moyen juridique n’est prévu ? Ils prendraient tout simplement une décision unilatérale de retrait. Point ! Il faut au contraire sortir vite en créant un état de fait, on ne peut pas comparer le FREXIT et le BREXIT. L’exemple de la Grande-Bretagne doit nous éclairer. Il suffit de voir l’attitude de l’Union européenne et les spéculations qui commencent pour voir que sans une rupture brutale et unilatérale, nous n’arriverons pas à notre but qui est de sortir de l’Union européenne pour combattre et abattre le néolibéralisme. La partie sera rude, mais avec l’article 50 elle sera tout simplement impossible, et tous nos adversaires des classes dominantes auraient tout loisir de bloquer la volonté populaire.

10.- Nous nous sommes demandés si le soutien à un homme et à un programme qui proposait de sortir de l’euro et de l’UE, comme le préconise le programme du Pardem, serait un pas dans la bonne direction. Car après tout ce pourrait être un point d’appui pour aller plus loin ensuite. Cette solution nous est apparue impraticable. Pour gagner contre la mondialisation néolibérale et pas seulement contre l’une de ses parties (l’euro, l’UE), il faut créer une dynamique politique sur les bonnes bases, celles qui peuvent faire gagner ce difficile pari. Pour réussir cette rupture, il faut l’attaque simultanée et frontale des trois piliers du piège néolibéral, par la sortie immédiate du libre-échange, le démantèlement tout aussi immédiat de la financiarisation de l’économie et des budgets publics, et la sortie sans le moindre délai de tous les traités internationaux néolibéraux et des institutions supranationales correspondantes. Et ce dès l’arrivée au pouvoir, en ayant axé la campagne sur cet objectif : retour immédiat au franc, annulation de la dette publique (que François Asselineau ne propose pas), nationalisation du secteur bancaire (que François Asselineau ne propose pas), suppression immédiate de la liberté de circulation des capitaux, etc. Toute autre méthode est forcément perdante, et nous promet un gigantesque retour de l’impasse 1981-1982, celle de la fausse rupture qui ne se donne pas les moyens, dès l’arrivée au pouvoir, de réaliser ce pour quoi une majorité de rupture a conquis le pouvoir. La trahison de cet espoir provoquera une situation pire que celle qui a suivi 1981. Outre qu’Asselineau cible beaucoup plus les États-Unis que les trois piliers de la mondialisation néolibérale, il privilégie de plus une tactique d’attente mortifère, celle de l’article 50, qui plongerait la France dans le chaos. Dans ce contexte, se contenter de donner une préférence par un vote à un homme et à un mouvement qui ressemble, sur tel ou tel point, à ce qu’il faut faire pour se libérer, sans se préoccuper de ce qui garantit le succès ou l’échec de la rupture nécessaire à accomplir pour que tout cela prenne sens, c’est confondre ces élections avec un vaste sondage. L’enjeu est de faire enfin démarrer une dynamique de rupture potentiellement victorieuse, et non pas simplement majoritaire, se contentant de ressembler vaguement à ce qu’il faudrait faire. Il n’y aura pas en cette matière de coup d’essai. Il faudra réussir dès la première tentative. Sinon c’est un piège grec qui nous attend pour au moins une décennie. À cet égard François Asselineau ressemble à Jean-Luc Mélenchon.

C’est pourquoi faire grandir le Pardem est bien pour l’instant la seule voie pour construire une dynamique de rupture gagnante contre la mondialisation néolibérale et son piège systémique redoutable qu’elle a dressé contre toute possibilité de retour en arrière.

 

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Analyse complète

 

I.- Silence sur la mondialisation néolibérale qui conduit à une erreur de diagnostic fatale sur l’origine du délabrement de la France

La lecture patiente des documents de l’UPR montre une faille majeure du raisonnement. Ce dernier se développe en effet en dehors de toute référence au néolibéralisme, comme s’il n’existait pas. Dès lors, Monsieur Asselineau ne peut qu’inscrire son action dans le cadre du système néolibéral mondial. Il est ainsi conduit à trouver des explications erronées sur l’origine des problèmes, l’entraînant vers une conception magique de la souveraineté.

 

A.- Les mots « mondialisation néolibérale », « capitalisme », « démondialisation » ou « classes sociales » sont absents des textes de l’UPR, inscrivant ce mouvement dans le cadre du système néolibéral mondial

L’expression « mondialisation néolibérale » est absente de la charte fondatrice de l’UPR, de son programme et de tous les discours de François Asselineau. C’est également le cas pour les mots « capitalisme », « démondialisation » ou « classes sociales ». L’omission de ces notions, essentielles pour analyser et comprendre la réalité, puis concevoir un projet politique émancipateur, montre que François Asselineau s’inscrit dans le cadre du système néolibéral mondial.

Alors que le fondateur de l’UPR fait preuve de courage et d’audace sur les questions taboues de la sortie de l’euro et de l’Union européenne, rejoignant ainsi notre combat, il cède à un autre tabou, plus important encore que le précédent, celui du rôle et de la nature de la mondialisation capitaliste, c’est-à-dire de l’origine de la crise systémique française, européenne et mondiale. Cette incompréhension du rôle des classes dominantes de la triade (États-Unis, Europe, Japon) dans la reconfiguration du monde et la mise en place de l’ordre néolibéral mondial est une profonde erreur de diagnostic. Les conséquences sont funestes pour le projet de François Asselineau, car ne pas comprendre le rôle de la mondialisation néolibérale dans l’origine de la crise systémique ne permet pas de résoudre les problèmes de la France, même en sortant de l’OTAN, de l’euro et de l’UE.

 

B.- Une analyse erronée des causes des « blocages de la situation française » qui ne tient aucun compte des politiques néolibérales

La Charte fondatrice de l’UPR estime que « Les blocages de la situation française découlent de l’inavouable – et inavouée – mise sous tutelle étrangère du peuple français. » Cette analyse est totalement erronée. Commençons par les « blocages de la société française » dont parle Monsieur Asselineau. De quels blocages parle-t-il ? C’est en réalité tout le contraire, la société française a été débloquée par les classes dirigeantes pour permettre un meilleur partage des richesses en leur faveur. Et ce sont les socialistes qui ont lancé le mouvement avec le « tournant de la rigueur de 1982-1983.

Ce déblocage s’est fait principalement par l’organisation et le maintien d’un très haut niveau de chômage qui présente beaucoup d’avantages pour les classes dirigeantes : pression sur les salaires, chantage à l’emploi, freinage de la conflictualité sociale, dégradation des conditions de travail, mise en déficit des régimes sociaux et réduction des prestations du fait de la baisse des rentrées de cotisations sociales, concurrence accrue entre les travailleurs… On peut ajouter les privatisations, les politiques d’austérité, la diminution des budgets pour les services publics et les associations…

L’opération a très bien fonctionné ! Le partage des richesses s’est très nettement redressé en faveur des classes dominantes. Et si l’on doit parler de « blocage », c’est à propos de la résistance acharnée du peuple face à ces politiques. Est-ce ce blocage-là que Monsieur Asselineau veut lever ?

 

C.- Une vision magique de la souveraineté

La déliquescence de notre patrie a été provoquée par les politiques néolibérales engagées depuis le « tournant de la rigueur » de 1982-1983 par les socialistes, et poursuivies sans désemparer par les gouvernements de gauche et de droite qui se sont ensuite succédés, soumis au système de Bruxelles. Ces politiques portent un nom : le néolibéralisme qui s’est abattu sur la planète. Ce n’est pas le fait que la France soit « sous tutelle étrangère », comme le prétend Monsieur Asselineau, qui provoque son rabaissement, c’est le néolibéralisme inclus dans les traités européens et tous ceux qui fondent les autres institutions supranationales comme l’OCDE, le FMI, la Banque mondiale (BM) et l’OMC. Trois arguments peuvent aider à mieux comprendre cette réalité.

Premièrement, un gouvernement français parfaitement souverain, hors de l’influence de toute « tutelle étrangère », ayant mené des politiques néolibérales, aurait obtenu le même résultat calamiteux qu’aujourd’hui. La souveraineté est nécessaire mais elle n’est pas suffisante. Elle n’est pas, en soi, la garantie que des politiques favorables au peuple seront menées.

Deuxièmement, les autres pays de la zone euro, et plus généralement ceux de l’Union européenne, sont dans la même situation de délabrement que la France. Notre pays n’est pas un cas isolé. Sont-ils, eux-aussi, sous « tutelle étrangère » ? Laquelle ? S’agit-il de la même ? En réalité, ils sont, comme la France, sous tutelle des institutions supranationales que sont l’OTAN, l’euro et l’Union européenne, mais aussi l’OCDE, le FMI, la BM, l’OMC. C’est pourquoi la sortie de l’euro, de l’Union européenne et de l’OTAN – évidemment nécessaire – est loin d’être suffisante.

Troisièmement, des gouvernements parfaitement souverains, hors de l’UE, aux États-Unis, en Norvège, au Japon… connaissent un état de crise permanent proche de celui de la France. Le problème n’est donc pas seulement français ni européen, il est beaucoup plus vaste. Et il ne tient pas à l’existence de souveraineté ou non, pour ces pays, mais à la nature des politiques menées.

Encore une fois, ce n’est donc pas l’absence de souveraineté et une « tutelle étrangère » qui sont la cause de la crise systémique, c’est la nature néolibérale des politiques suivies par ces gouvernements placés sous la tutelle des traités et des institutions supranationales, pas seulement l’euro et l’Union européenne. D’ailleurs, s’il fallait chercher la puissance étrangère coupable de cette « tutelle » - ce que ne fait pas François Asselineau – nous ne trouverions personne, nous ne pourrions nommer aucun pays. C’est le système européen lui-même et les autres institutions supranationales qui constituent la tutelle qui nous étouffe.

Autre exemple tiré de la Charte fondatrice de l’UPR qui témoigne de cette carence d’analyse et de cette vision magique attribuée à la souveraineté : « Seules l’indépendance de la France et la souveraineté du peuple français peuvent assurer la prospérité de notre pays et le bon fonctionnement de sa démocratie, son rayonnement dans le monde, ses actions pour la paix et pour l’amitié entre les peuples, sans distinction d’appartenance géographique ou d’appartenance religieuse. » Hélas non ! La souveraineté crée un cadre nécessaire, obligatoire, indispensable, qui est la condition première pour que le peuple soit aux commandes. Mais elle n’est qu’un ensemble de possibles. Il n’existe aucun déterminisme, aucun automatisme entre souveraineté et mise en œuvre de politiques de justice sociale, de progrès démocratique, de préoccupation environnementale, de coopération internationale. Nous pouvons avoir un gouvernement souverain qui nous appliquera souverainement une politique néolibérale de régression sociale et démocratique !

C’est pour cette raison que nous parlons de démondialisation, c’est-à-dire de sortie de l’ordre néolibéral mondial. À cet égard, nous tenons à répondre à la caricature faite de nous par Monsieur Asselineau. Ce dernier nous moque en qualifiant notre programme « d’ubuesque ». Il déforme nos positions en affirmant que nous voulons démanteler la mondialisation. C’est absurde ! Aucun pays ne peut, à lui seul, faire disparaître les trois piliers de la mondialisation néolibérale que sont les institutions supranationales et les traités sur lesquels elles reposent, le libre-échange et la globalisation financière. Notre démarche est à la fois plus modeste et plus efficace : modeste car nous nous limitons à faire ce que nous permet notre souveraineté retrouvée, c’est-à-dire sortir de cette mondialisation qui continuera sans nous ; efficace, car notre rupture avec l’ordre néolibéral mondial permettra de résoudre nos problèmes, en France.

La démarche doit être systémique. Il s’agit de sortir du système de la mondialisation néolibérale et pas simplement d’une de ses parties (l’euro, l’UE). Car ne s’attaquer qu’à une partie du système revient à trancher une seule tête de l’hydre, comme l'Hydre de Lerne, de la mythologie grecque antique, qui était un serpent monstrueux à sept têtes, qui repoussaient à mesure qu'on les coupait. Il fallait les couper toutes d'un coup. Cette erreur de diagnostic faite par Monsieur Asselineau, qui consiste à ne s’attaquer qu’à une partie du système croyant que ce dernier l’acceptera « sereinement », est très préoccupante. Les conséquences de cette carence, on le verra plus loin, empêchent François Asselineau de résoudre les problèmes majeurs du pays, principalement le chômage et, plus généralement, ce qu’il est convenu d’appeler la question sociale, la question environnementale et la question de la démocratie. Car la France n’aura pas retrouvé sa pleine et entière souveraineté en restant membre d’institutions supranationales comme l’OCDE, le FMI, la BM, l’OMC, même si elle est sortie de l’euro et de l’UE.

Certes, François Asselineau affirme la nécessité de la souveraineté nationale. Mais il n’évoque jamais la nécessité de la rupture avec les politiques néolibérales qui sont pourtant la cause de toutes les difficultés. C’est pourquoi son projet ne peut qu’échouer, provoquant une nouvelle déception chez ceux qui se seraient laissés tromper.

 

II.- Une conception limitée de la souveraineté ne concernant que l’euro, l’Union européenne et l’OTAN, qui oublie les autres institutions supranationales et la nécessité de la démondialisation

Le Pardem et l’UPR partagent de nombreux points communs dans les domaines de la défense et de la politique étrangère. Mais au-delà de ces quelques aspects ponctuels, nous divergeons sur l’essentiel car Monsieur Asselineau ne veut pas s’engager dans la voie de la démondialisation, pourtant seul moyen de recouvrer notre souveraineté pleine et entière. Monsieur Asselineau se contente en réalité d’une souveraineté limitée, la France, avec lui, restera tenue en laisse.

 

A.- Des convergences en matière de défense et de politique étrangère annulées par l’absence de vision géopolitique de François Asselineau

Nous sommes en accord sur les points qui suivent, figurant dans le programme de l’UPR et que l’on retrouve aussi dans celui du Pardem :

  • « Désengager nos armées des guerres menées sous couvert de l’OTAN et de l’Union européenne en Afghanistan, en Libye ou ailleurs dans le monde. »
  • « Rappeler le caractère nécessaire et suffisant de la dissuasion nucléaire. Notamment face aux États-Unis qui militent pour la limitation de l’arme nucléaire... Chez les autres. »
  • « Réaffirmer le lien armée-nation. Cela passe par une politique de défense menée au service des intérêts français qui contrebalance le pouvoir hégémonique de la puissance du moment. »
  • « Redonner vigueur à l’ONU et à la primauté du droit international. »
  • « Dénoncer les dérives du prétendu droit d’ingérence humanitaire. »
  • « Retirer immédiatement la France de l’OTAN – et pas seulement de son ‘’Commandement militaire intégré’’ –, structure militaire ayant perdu toute légitimité depuis la fin de la Guerre froide. »
  • « promouvoir les coopérations internationales de toute nature avec tous les États de la planète, sans procéder à une quelconque distinction, moralement et éthiquement suspecte, en fonction de leur appartenance ou non au continent européen. » (Charte fondatrice)

Les points d’accord que nous avons avec François Asselineau dans les domaines de la défense et de la politique étrangère ne suffisent pas à lui accorder notre soutien. Son programme est pourtant quasi identique à celui du Pardem sur ces questions, bien que nous allions beaucoup plus loin que lui sur deux sujets. D’abord, nous revendiquons l’adhésion de la France au Mouvement des Pays Non-Alignés. Ensuite, nous reprenons la perspective fixée en 1948 dans la Charte de La Havane de créer l’Organisation internationale du commerce (OIC), en opposition à l’OMC libre-échangiste dans laquelle Monsieur Asselineau veut que la France retourne. Ce qui constitue pour nous une divergence majeure.

 

B.- Une revendication de souveraineté limitée, la France reste tenue en laisse

Son absence d’analyse de la mondialisation néolibérale amène François Asselineau à refuser la pleine et entière souveraineté de la France. Il n’intègre pas la nécessite de sortir du premier pilier de la mondialisation néolibérale que sont toutes les institutions supranationales. Sa conception de la souveraineté de la France est réduite, elle est limitée, elle ne s’inscrit pas dans une perspective de démondialisation.

François Asselineau est donc loin d’être clair sur l’exigence de souveraineté et d’indépendance de la France, son programme diverge radicalement du nôtre sur ce point décisif. Certes, nous ne pouvons que souscrire à cette idée que nous développons nous-mêmes : « Rétablir l’indépendance de la France, rendre sa liberté au peuple français, et restituer à notre pays son rôle historique de porte-parole de la liberté des peuples et des nations à travers le monde. » (Charte fondatrice). Mais cette « indépendance » est illusoire puisque la France, selon François Asselineau, doit rester dans l’OCDE, la BM, le FMI et l’OMC.

De la même manière nous sommes d’accord avec « Sortir de l’euro » (Programme) puisque Jacques Nikonoff, le président du Pardem, a publié le premier livre sur le sujet, en France, intitulé Sortons de l’euro (Mille et une nuits, 2011). Pour la même raison nous sommes évidemment d’accord pour « Adopter le FRANC comme monnaie nationale (FRF) et inscrire dans notre Constitution : le franc est la monnaie de la république française » comme ceci a été longuement développé dans l’ouvrage précité, et encore « Supprimer le Titre XV de la Constitution française (Titre sur l’Union européenne, adopté en 2008) » qui constitue l’une de nos revendications phares depuis plusieurs années.

Même accord de notre part avec ceci « L’UPR procède à la distinction fondamentale entre la nation et le patriotisme d’un côté, le nationalisme de l’autre. Reprenant à son compte la fameuse parole de Jaurès qui déclarait que ‘’la patrie est le seul bien de ceux qui n’ont rien’’, l’UPR insiste sur le fait que la patrie et la nation sont les seules instances où peuvent s’exercer réellement la démocratie et la solidarité entre les générations et les catégories sociales. » (Charte fondatrice).

En effet, la reconquête de la souveraineté étatique est absolument nécessaire, elle doit être en tête de toutes nos revendications et de tous nos efforts. Mais elle doit être complète et ne pas se limiter à l’OTAN, à l’euro et à l’Union européenne. Elle doit intégrer toutes les autres institutions supranationales. Elle doit aussi concerner l’économie. Ces multiples sorties permettront de créer un effet de seuil pour affaiblir l’ordre néolibéral mondial dans une perspective démondialisatrice. Même cela n’est toutefois pas suffisant, car il faut également savoir ce que nous allons faire une fois notre liberté retrouvée, quelle politique nous allons mener.

Le programme de François Asselineau semble ne pas se rendre compte des graves atteintes à la souveraineté que constitue le maintien de la France dans les autres institutions supranationales. Faisons un bref inventaire :

L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)

Elle est née officiellement le 30 septembre 1961, date d’entrée en vigueur d’une Convention signée par 35 États. Elle est issue de l’Organisation européenne de coopération économique (OECE) instituée en 1948 à l’initiative des États-Unis pour administrer le plan Marshall, financé par ce pays, afin de reconstruire le continent dévasté par la guerre et lui permettre de faire face au bloc communiste. La Convention relative à l'Organisation de coopération et de développement économiques a été signée à Paris le 14 décembre 1960.

Cette organisation internationale n’a pas un caractère supranational aussi contraignant que des institutions comme l’UE ou l’OMC. Mais son rôle dans la diffusion de l’idéologie néolibérale est absolument considérable. Elle élabore des « normes mondiales, des conventions internationales, des recommandations » dans tous les domaines des politiques publiques comme « les questions économiques et commerciales, l’emploi, l’éducation, la santé, les questions sociales, les migrations, l’environnement »… Dans son rapport annuel 2016 on peut lire : « Améliorer la mondialisation »…

Comment peut-il en être autrement quand lArticle 1 stipule que « L'Organisation de Coopération et de Développement Économiques a pour objectif de promouvoir des politiques visant : c) à contribuer à l'expansion du commerce mondial sur une base multilatérale et non discriminatoire conformément aux obligations internationales. » Ou encore à l’Article 2 : « En vue d'atteindre ces objectifs, les Membres conviennent, tant individuellement que conjointement : d) de poursuivre leurs efforts en vue de réduire ou de supprimer les obstacles aux échanges de biens et de services, ainsi qu'aux paiements courants, et de maintenir et étendre la libération des mouvements de capitaux ; » Et encore à l’Article 5 : « En vue d'atteindre ses objectifs, l'Organisation peut : a) prendre des décisions qui, sauf disposition différente, lient tous les Membres ; ».

L’idéologie néolibérale transpire à chaque phrase de ce texte. Comment et pourquoi rester dans une organisation qui mettra toutes ses forces pour combattre un gouvernement français (ou autre) qui oserait s’engager dans la démondialisation ?

L'Organisation mondiale du commerce (OMC)

Elle s'occupe des règles régissant le commerce entre les pays. L’OMC est née de négociations dites du Cycle d’Uruguay, qui se sont déroulées de 1986 à 1994, et dans les négociations menées antérieurement dans le cadre de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT). Les Accords de l’OMC énoncent les règles juridiques fondamentales régissant le commerce international. Il s’agit essentiellement de contrats qui obligent les gouvernements à maintenir leurs politiques commerciales dans les limites convenues. Le but primordial du système est de faire en sorte que le commerce soit aussi « libre » que possible, et cela passe par la suppression des « obstacles ». Les Accords de l’OMC portent sur les marchandises, les services et la propriété intellectuelle. « Ils énoncent les principes de la libéralisation et les exceptions autorisées. Ils contiennent les engagements pris par les différents pays pour réduire les droits de douane et les autres obstacles au commerce et pour ouvrir et maintenir ouverts les marchés de services. » Les Accords de l'OMC de 1994 traitent des principes généraux : l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) (pour les marchandises) et l’Accord général sur le commerce des services (AGCS). Il en est de même pour le troisième domaine, les Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC).

Comme pour l’OCDE, les textes fondateurs de l’OMC transpirent l’idéologie libérale. Le seul principe admis sans discuter est celui de la « libéralisation » du commerce censé avoir des vertus magiques sur le développement économique. Si la France s’engage dans la démondialisation, l’OMC lui mettra des bâtons dans les roues car, par exemple, il est impossible de résoudre le problème du chômage sans prendre des mesures protectionnistes. Celles-ci sont interdites par l’OMC. Alors pourquoi y retourner comme le propose Monsieur Asselineau dans son programme ?

Le Fonds monétaire international (FMI)

Ses Statuts ont été adoptés à la Conférence monétaire et financière des Nations Unies à Bretton Woods (New Hampshire) le 22 juillet 1944. L’article 1 traite de ses buts qui sont les suivants :

  • « Promouvoir la coopération monétaire internationale au moyen d’une institution permanente fournissant un mécanisme de consultation et de collaboration en ce qui concerne les problèmes monétaires internationaux.
  • Faciliter l’expansion et l’accroissement harmonieux du commerce international et contribuer ainsi à l’instauration et au maintien de niveaux élevés d’emploi et de revenu réel et au développement des ressources productives de tous les États membres, objectifs premiers de la politique économique.
  • Aider à établir un système multilatéral de règlement des transactions courantes entre les États membres et à éliminer les restrictions de change qui entravent le développement du commerce mondial. »

Il s’agit de « Donner confiance aux États membres en mettant les ressources générales du Fonds temporairement à leur disposition moyennant des garanties adéquates, leur fournissant ainsi la possibilité de corriger les déséquilibres de leurs balances des paiements sans recourir à des mesures préjudiciables à la prospérité nationale ou internationale. »

L’article IV (Obligations relatives aux régimes de change - Section 1. Obligations générales des États membres) stipule que : « le but essentiel du système monétaire international est de fournir un cadre qui facilite les échanges de biens, de services et de capitaux entre nations et qui favorise une croissance économique saine, chaque État membre s’engage à collaborer avec le Fonds et avec les autres États membres pour assurer le maintien de régimes de change ordonnés et promouvoir un système stable de taux de change. »

Comme pour l’OCDE et l’OMC, on retrouve le même discours libéral et la croyance – constamment démentie par les faits – que le libre-échange généralisé (marchandises, services, capitaux, main-d’œuvre) serait bénéfique au développement économique et à l’emploi. La France a tout à perdre à rester dans un tel organisme qui ne peut qu’entraver ses efforts de reconquête de sa souveraineté, y compris monétaire, économique, culturelle et intellectuelle.

Et puis encore ceci : « le Fonds exerce une ferme surveillance sur les politiques de change des États membres et adopte des principes spécifiques pour guider les États membres en ce qui concerne ces politiques. Les décisions prises par le Fonds conformément aux dispositions du présent article sont réputées s’appliquer à toutes les monnaies des États membres. » L’Article VIII (Obligations générales des États membres) précise : « aucun État membre n’impose, sans l’approbation du Fonds, de restrictions à la réalisation des paiements et transferts afférents à des transactions internationales courantes. Les contrats de change qui mettent en jeu la monnaie d’un État membre et sont contraires à la réglementation du contrôle des changes de cet État membre maintenue ou imposée conformément aux présents Statuts ne sont exécutoires sur les territoires d’aucun État membre. »

Il est clair que l’annulation de la dette publique de la France (ou d’un autre pays), la sortie de l’euro, le contrôle des changes et des mouvements de capitaux, l’interdiction des délocalisations, la non-convertibilité du franc au moment de la sortie de l’euro, le recentrage de l’activité de la Banque de France au service de l’investissement et d’un développement économique fondé sur la mutation écologique du mode de production affoleront le FMI. Il vaut mieux en être conscient plutôt que de se mettre la tête dans le sable comme le fait François Asselineau. C’est pourquoi il faut sortir du FMI plutôt que de tenter – sans aucun espoir – de le modifier de l’intérieur. D’autant que cette institution est contrôlée par le gouvernement des États-Unis.

La Banque Internationale pour la Reconstruction et le Développement (Banque mondiale – BM)

Il est indiqué dans ses statuts que « La Banque a pour objectifs :

  • D'aider à la reconstruction et au développement des territoires des États membres, en facilitant l'investissement de capitaux consacrés à des fins productives, - y compris la restauration des économies détruites ou disloquées par la guerre, la réadaptation des moyens de production aux besoins du temps de paix et l'encouragement au développement des ressources et moyens de production des pays les moins avancés.

 

  • De promouvoir les investissements privés à l'étranger au moyen de garanties ou de participations aux prêts et autres investissements effectués par les fournisseurs privés de capitaux ; et, à défaut de capitaux privés disponibles à des conditions raisonnables, de compléter l'investissement privé sous des modalités appropriées et en fournissant à des fins productives des moyens financiers tirés de son propre capital, des fonds qu'elle s'est procurés et de ses autres ressources. »

Ces objectifs semblent frappés au coin du bon sens. Pour autant, on retrouve là encore un discours imbibé de libéralisme mettant en avant la liberté de circulation des capitaux et des investissements. On a vu que la BM, pour accorder ces capitaux (sous forme de prêts), a exigé la mise en œuvre de « plans d’ajustement structurel » qui ont en réalité détruit les États des pays bénéficiaires de ces prêts. L’éducation, la santé, la démocratie, la sécurité, la protection de l’environnement, l’agriculture vivrière ont été saccagés. Alors pourquoi rester membre de la Banque mondiale, d’autant que cette institution est totalement sous le contrôle du gouvernement des États-Unis ?

La sortie de l’euro et de l’Union européenne, si elle ne s’accompagne pas de la sortie de toutes les autres institutions supranationales qui entravent la liberté de la France, comporte un risque majeur d’échec. C’est la voie la plus inefficace qui est paradoxalement choisie par François Asselineau.

 

III.- Pas de remise en cause du libre-échange, l’un des trois piliers sur lesquels repose la mondialisation néolibérale

Le programme de François Asselineau contient quelques timides mesures protectionnistes, assez peu efficaces, et en tout cas incompatibles avec les règles de l’OMC dans laquelle il veut faire revenir la France. À aucun moment il n’évoque la Charte de La Havane de 1948 qui offre pourtant des perspectives intéressantes pour reconfigurer la concurrence internationale.

 

A.- Quelques mesures protectionnistes, très loin de faire le compte

On trouve dans le programme de François Asselineau :

  • « Prendre des mesures de sauvegarde immédiate (en termes douaniers) dans un certain nombre de secteurs industriels clés. » C’est interdit par les règles de l’OMC dans laquelle Monsieur Asselineau veut que la France retourne ! En outre, l’imprécision de la formule ressemble au catalogue des programmes des partis du système qui évitent toujours d’entrer dans les détails pour ne pas être liés par leurs promesses. Pour être conséquent, Monsieur Asselineau devrait indiquer quels sont les « secteurs industriels clés » qu’il évoque, et quelles sont les mesures qu’il envisage. En l’absence de ces précisions la formule de François Asselineau n’a aucune valeur.

  • « Relocaliser en France le plus grand nombre possible de commandes publiques. » L’idée est bonne, nous la proposons nous-mêmes, mais elle manque de précisions. En ce qui nous concerne, nous avons rédigé une proposition de loi anti-délocalisation et relocalisation…

  • En matière agricole « Stabiliser le marché et l’orienter vers les productions locales. » Phrase opaque qui ne permet pas de se faire une idée de la politique qui sera suivie.

  • « Garantir l’autosuffisance alimentaire nationale et participer à la sécurité alimentaire mondiale. » Nous développons déjà ce point.

  • « Discussion avec l’OMS sur les règles de l’organisation alimentaire mondiale de la FAO liée au codex alimentarius afin de refuser des normes dans la production nationale et modification des normes alimentaires fruits et légumes. » Excellente idée.

  • « Création d’une taxe verte à l’importation. » Cette « taxe verte » est interdite par l’OMC dans laquelle Monsieur Asselineau veut faire revenir la France. Elle serait en fait un droit de douane. Nous sommes favorables à une augmentation sélective des droits de douane affectant les marchandises entrant en concurrence déloyale avec nos productions nationales. Mais l’instrument le plus efficace est le quota d’importation.

Ces mesures seront interdites par l’OMC. Que fera Monsieur Asselineau ? Il se couchera ? Il sortira de l’OMC ? S’il sort de l’OMC, autant l’annoncer tout de suite et s’y préparer. En tout cas ces mesures auront un impact assez faible sur l’emploi.

 

B.- François Asselineau propose de « Récupérer immédiatement notre siège plein et entier à l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) », ce qui interdit toute possibilité de reconstruire un nouveau type de plein-emploi

François Asselineau propose, nous l’avons déjà signalé, de « Récupérer immédiatement notre siège plein et entier à l’Organisation mondiale du Commerce (OMC). » C’est-à-dire de se jeter dans la gueule du loup. À quoi sert de sortir de l’Union européenne si c’est pour rester dans le système libre-échangiste mondialisé ? François Asselineau, s’il évoque quelques mesures de sauvegarde, ne s’engage pas dans une sortie du système libre-échangiste. Il n’évoque pas la Charte de La Havane qui offre pourtant une nouvelle perspective pour le commerce international à condition d’être rénovée. Pour comprendre ce qu’est la Charte de La Havane, cliquez ci-dessous :

http://fr.calameo.com/read/00433344339481bef1b26

http://www.nikonoff2017.fr/programme/ii-souverainete-politique-diplomatique-militaire/564-video-13-agir-pour-faire-vivre-la-charte-de-la-havane

Le programme de Monsieur Asselineau, à cette étape de notre analyse, est donc soumis à deux piliers sur trois de la mondialisation néolibérale : son maintien dans toutes les institutions supranationales sauf l’euro et l’Union européenne, son acceptation du libre-échange. C’est la raison pour laquelle il ne propose aucune politique de relance basée principalement sur la demande (augmentation des salaires et des revenus de transfert, création importante d’emplois, investissements, mobilisation de la politique monétaire et budgétaire pour profiter du retour du franc). Il sait, par expérience, qu’une politique de relance par la demande ne suscitera que l’augmentation des importations et peu de créations d’emplois, sauf si des mesures protectionnistes sont prises. Comme il ne veut pas de protectionnisme il ne fait pas de relance, et comme il ne veut pas de relance il se prive d’une possibilité de créer un nombre significatif d’emplois, seul moyen de résoudre la question sociale. Dans ces conditions il ne pourra pas gagner le soutien des classes populaires pour les épreuves à venir. Elles ne voteront pas pour lui, il n’a aucune chance d’être élu.

De la même manière, l’absence de politique industrielle basée en particulier sur la substitution aux importations – qui nécessite des mesures protectionnistes - est révélatrice de sa négligence portée à notre avenir industriel. François Asselineau aurait au moins pu s’inspirer de nos travaux sur la politique industrielle pour élaborer son projet…

 

IV.- Acceptation de la globalisation financière, autre pilier de la mondialisation néolibérale

À première vue, une lecture rapide et superficielle du programme de François Asselineau peut laisser croire que ce dernier veut reconquérir la souveraineté économique et financière de la France. Il propose en effet des nationalisations et des mesures concernant les marchés financiers. Mais une lecture attentive montre que nous sommes à des années-lumière des ambitions du programme du Conseil national de la Résistance dont il se réclame. On peut même parler de tromperie sur la marchandise et d’escroquerie. Prenons deux exemples, celui de l’industrie et celui des banques.

 

A.- Les nationalisations ne concernent que les services publics et sont loin d’avoir l’ambition du programme du Conseil national de la Résistance

Bien sûr, quand on lit dans le programme de François Asselineau qu’il veut nationaliser des entreprises, la chose est devenue tellement inhabituelle qu’elle paraît extraordinaire. Pourtant il ne propose que de renationaliser les services publics, il n’y a aucune nationalisation de groupes industriels et de services.

  • « Il s’agit d’organiser le ‘’retour à la nation’’ (c’est-à-dire une nationalisation totale ou partielle, selon les cas) des entreprises suivantes : EDF, GDF, France Telecom, Sociétés d’autoroutes, Sociétés de réseaux d’adduction d’eau, TF1, TDF, Tout établissement financier secouru par des fonds publics. » Attention, la notion de « nationalisation partielle » est très dangereuse. Aucun intérêt privé ne doit être présent dans une entreprise nationalisée, c’est contraire à son objet d’intérêt général.

  • « Annuler définitivement le processus de privatisation rampante de La Poste. » (Programme)

  • « Poser le principe constitutionnel de la propriété publique de La Poste, des producteurs et fournisseurs de gaz et d’électricité, de la SNCF, des autoroutes, des services d’adduction d’eau et des deux premières chaînes de télévision nationale. »

Plusieurs services publics manquent à cette liste et devront être nationalisés :

  • Air France-KLM privatisé sous le nom d’Air France par le gouvernement de Lionel Jospin (juin 1997 – mai 2002).

  • Aéroports de Paris privatisé sous le gouvernement de Dominique de Villepin (mai 2005 – mai 2007).

  • Direction des constructions navales (DCNS) privatisée sous le gouvernement de Dominique de Villepin (mai 2005 – mai 2007).

  • Aéroport de Toulouse-Blagnac, privatisé sous le Gouvernement de Manuel Valls (mars 2014 - février 2016).

  • Airbus Safran Launchers (ASL), privatisé sous le nom d’Arianespace lors du gouvernement Valls (mars 2014 - février 2016).

Il manque aussi toutes les entreprises privatisées depuis 1986, en particulier de très grandes entreprises stratégiques qui devront être nationalisées. En voici la liste :

  • Privatisations Chirac (mars 1986 – mai 1988) : Saint-Gobain, Alcatel-Lucent privatisé sous le nom de Compagnie générale d’électricité (CGE), Havas, Mécanique Aviation Traction (Matra) privatisé sous le nom de Matra Électronique.

  • Privatisations Rocard (juin 1988 – mai 1991) : Renault.

  • Privatisations Balladur (mars 1993 – mai 1995) : Sanofi privatisé sous le nom Rhône-Poulenc, Total privatisé sous le nom Elf-Aquitaine.

  • Privatisations Juppé (mai 1995 – novembre 1995) : CMA CGM privatisé sous le nom Compagnie générale maritime (CGM), Alcan EP privatisé sous le nom Péchiney, les usines françaises d’ArcelorMittal privatisées sous le nom Usinor-Sacilor, Compagnie française de navigation rhénane (CFNR), Atos privatisé sous le nom Bull.

  • Privatisations Jospin (juin 1997 – mai 2002) : Eramet, Technicolor privatisé sous le nom Thomson Multimédia (TMM), Airbus Group privatisé sous le nom Aérospatiale (EADS).

  • Privatisations Raffarin (mai 2002 – mai 2005) : Safran privatisé sous le nom Société nationale d’étude et de construction de moteurs d’avions (Snecma), Thales et STMicroelectronics privatisés sous le nom Thomson CSF.

Nous nous étonnons que la loi de privation du 19 juillet 1993, sous le Gouvernement Balladur, ne soit pas abrogée. elle concerne : Aerospatiale, Société Air France, Banque Hervet, Banque nationale de Paris, Caisse centrale de réassurance, CNP Assurances, Compagnie des machines Bull, Compagnie générale maritime, Crédit lyonnais, Pechiney, Régie nationale des usines Renault, Rhône-Poulenc SA, Société centrale des Assurances générales de France, Société centrale du Groupe des assurances nationales, Société centrale Union des assurances de Paris, Société française de production et de création audiovisuelles, Société nationale d'exploitation industrielle des tabacs et allumettes, Société marseillaise de crédit, Société nationale d'étude et de construction de moteurs d'aviation, Société nationale Elf-Aquitaine, SNPE, Thomson SA, Usinor Sacilor, France Télécom, Gaz de France SA.

Alors Asselineau fait du Balladur ? Le programme de François Asselineau, en effet, n’a rien à voir avec le programme du CNR. Rappelons ici les ambitions du programme du CNR dans le domaine de l’économie :

- « l’instauration d’une véritable démocratie économique et sociale, impliquant l’éviction des grandes féodalités économiques et financières de la direction de l’économie ».

- « une organisation rationnelle de l’économie assurant la subordination des intérêts particuliers à l’intérêt général ».

- « le retour à la nation des grands moyens de production monopolisée, fruits du travail commun, des sources d’énergie, des richesses du sous-sol… ».

- « la participation des travailleurs à la direction de l’économie ».

Avec le programme de François Asselineau notre souveraineté économique n’est pas assurée, les entreprises ne sont pas libérées de la finance, les investisseurs non-résidents restent majoritaires dans le capital des entreprises à base nationale.

 

B.- En ce qui concerne les banques, c’est le jour et la nuit entre le programme du CNR et celui de Monsieur Asselineau

Concernant les banques et les marchés financiers, son programme contient quelques mesures utiles et nécessaires, mais elles sont très insuffisantes pour mettre un terme à la dictature des marchés financiers. Les seules mesures qu’il préconise sont en effet les suivantes :

  • « Réattribuer à la Banque de France son rôle normal de financement de l’État et des collectivités locales. » Ce principe est bon mais il ne suffit pas à définir une politique. Le Trésor pourra-t-il emprunter à la Banque de France à taux zéro ? Pourra-t-il obtenir des avances non-remboursables ? Le marché obligataire public sera-t-il fermé ?

  • « Contrôle des flux de capitaux. » C’est contradictoire avec le retour de la France à l’OMC que propose François Asselineau et son refus de sortir de la Banque mondiale et du FMI. Ces institutions supranationales ne laisseront pas faire et mieux vaut être dehors tout de suite.

  • « Évincer les fonds d’investissement et les grands groupes de toutes les sociétés liées au service public. » C’est contradictoire avec ce qui est écrit plus haut concernant la possibilité de « nationalisations partielles ».

Le programme de François Asselineau ne propose aucune nationalisation bancaire ou de compagnies d’assurance ! Comment espère-t-il lutter contre la dictature de la finance ? Comment espère-t-il remettre les banques au service d’un financement sain de l’économie ? Il n’est qu’une caricature du programme du Conseil national de la Résistance dont il se réclame pourtant et qui affirme : « le retour à la nation (…) des compagnies d’assurances et des grandes banques ».

Il ne propose même pas de renationaliser :

  • La Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur (COFACE), privatisée par Balladur (mars 1993 – mai 1995).

  • Dexia privatisée sous le nom Crédit local de France (CLF) par Rocard (juin 1988 – mai 1991) et que nous proposons qu’il reprenne, sous forme d’EPA, son ancien nom de CAECL (Caisse d’aide à l’équipement des collectivités locales), ses missions d’origine de monopole du crédit aux collectivités territoriales, et sa place au sein de la CDC.

Au total, François Asselineau ne veut scier aucun des trois piliers sur lesquels repose la mondialisation néolibérale. Comment, dans ces conditions, prétendre récupérer la souveraineté de la France, même en sortant de l’OTAN, de l’euro et de l’Union européenne ? Le cas de la finance est particulièrement emblématique des faux-semblants du programme de Monsieur Asselineau. Il témoigne d’une profonde sous-estimation du poids de la finance et de ses effets désastreux qui ne permettra pas de conduire la sortie « sereine » de l’euro qu’il imagine.

 

V.- Absence d’un véritable projet social, démocratique et environnemental car François Asselineau a choisi le capital contre le travail

En matière sociale, environnementale et démocratique, le programme de François Asselineau n’a aucun rapport avec le programme du CNR bien qu’il s’en réclame. Ce dernier invente la Sécurité sociale, accorde le droit de vote aux femmes, crée les comités d’entreprise… Face à cette ambition, le programme de François Asselineau est vide en matière sociale, démocratique et environnementale. Il n’a donc aucune chance d’entraîner dernière lui les classes populaires, son projet politique est mort-né.

On comprend pourquoi, puisque pour Monsieur Asselineau il s’agit de « Réussir l’alliance entre le capital et le travail. » Le serpent de mer de « l’alliance entre le capital et le travail » est un vieux slogan de la droite et la base de la doctrine sociale de l’église apostolique romaine (encyclique Rerum Novarum de Léon XIII, en 1891). Il vise à désarmer le monde du travail face aux classes dominantes qui possèdent le capital. Nous parlons ici évidemment du grand capital, pas de la petite et moyenne propriété. Il n’est pas admissible, pour nous, de prôner « l’alliance » entre le grand capital et le travail. Non seulement aucune alliance n’est possible, mais elle n’est pas souhaitable, car le mode de relations entre le grand capital et le travail est fondé sur la lutte, le conflit entre ces classes sociales que tout oppose. Si une telle « alliance » voyait le jour, elle signifierait la reddition du monde du travail.

Certes, comme tous les candidats, François Asselineau ne manque pas d’assurer de sa volonté de justice sociale. Mais elle n’est pas développée, elle est souvent ambiguë et peu convaincante, parfois préoccupante. Les questions de l’environnement ne sont quasiment pas évoquées, celles du chômage sont totalement éliminées.

 

A.- Aucune ambition sociale

L’effet de contraste avec le programme du Conseil national de la Résistance est saisissant, aucune grande réforme sociale n’est proposée. En ce qui nous concerne, nous proposons par exemple le « droit opposable à l’emploi ». Dans le programme de François Asselineau, il n’y a aucune avancée sociale, les progrès sont très limités :

  • « Relever immédiatement le SMIC à 1 500 € brut par mois. » Le smic mensuel étant de 1 480,27 euros bruts depuis le 1er janvier 2017, la générosité de Monsieur Asselineau l’amène à donner 19,13 euros supplémentaires par mois aux smicards ! Rappelons que les syndicats revendiquent un SMIC entre 1 600 et 1 700 euros brut.

Plusieurs propositions sont ambiguës et ne permettent pas de se faire une idée exacte de ce qui est réellement proposé :

  • « Améliorer la répartition de la valeur créée dans l’entreprise. » Le principe est bon, mais quelle est la clé de répartition ? Celle-ci procèdera-t-elle de la loi ou de la négociation collective, et à quel échelon (l’entreprise ? la branche ?).

  • « Confirmer solennellement le rôle central de la Sécurité sociale pour assurer la justice sociale entre les citoyens français. » Excellent principe que nous adoptons nous-mêmes, mais que veut-il dire exactement ?

  • « Assurer, pour les agriculteurs, un prix minimum de viabilité en-dessous duquel la grande distribution ne pourra pas descendre. » Bon principe, mais qui serait beaucoup plus efficace si la grande distribution était nationalisée – avec les centrales d’achat – comme nous le proposons.

  • « Permettre à tous les enfants d’avoir accès à la culture la plus développée de façon à obtenir une élite non de naissance mais qui soit de mérite. »Ce genre d’affirmations, avec lesquelles tout le monde ne peut qu’être d’accord, devrait être évité dans un programme qui se veut sérieux.

  • « Accès égal et digne à la santé et à la médecine. » Même remarque que précédemment.

  • « Inscription de la sécurité sociale dans la constitution. » Pourquoi pas s’il s’agit d’autre chose que simplement mettre de l’encre sur du papier.

  • « Remboursement à 100% par la SS. » Remboursement de quoi ?

  • « Hausse des salaires du personnel des Hôpitaux de l’assistance publique. » Combien ? Quand ?

  • « Sanctuarisation d’une médecine accessible sur tout le territoire. » Même remarque que précédemment.

  • « Inscrire dans la Constitution le principe de la retraite par répartition et celui d’une retraite minimale pour assurer à chacun une existence convenable. » C’est bien beau, mais à quel niveau cette « retraite minimale » ?

D’autres éléments sont plus inquiétants :

  • Il n’y a strictement rien sur la réduction du temps de travail, sur l’abrogation de la loi Travail (El Khomry), des droits nouveaux pour les salariés.

  • « L’État renforcera les dispositifs – en partenariat avec les entreprises – pour que les bas salaires soient réellement attractifs par rapport aux situations de chômage indemnisé (en particulier pour tenir compte des frais de transport domicile-travail). » S’agit-il de baisser les indemnités chômage ? À partir de quel niveau un salaire est-il considéré comme bas ? En quoi un tel salaire puisse-t-il être « attractif » ?

  • « Réexaminer, de façon générale et complète, la question des retraites dans un cadre dégagé des instructions européennes. » Cela ne suffit pas et ne constitue pas une position claire sur la question des retraites. Quel âge de départ ? Quel revenu de remplacement ? Quel niveau de cotisations sociales patronales et salariales ?

  • « Arrêt immédiat de l’augmentation du nombre d’annuités (plafonné à 41) et du report de l’âge légal. » Le simple arrêt est notoirement insuffisant, il faut en réalité revenir aux règles sociales qui ont suivi la Libération : retraite pleine et entière à 60 ans avec 37,5 annuités dans le privé comme dans le public. Si l’on bloque le compteur à 41 annuités, on impose aux personnes ayant poursuivi des études par exemple jusqu’à 25 ans, de prendre leur retraite à 66 ans ! Sauf si les années d’études sont prises en compte pour le calcul de la retraite, ce que ne propose pas Monsieur Asselineau.

  • « Développer l’actionnariat salarié qui permettra de dissuader les délocalisations et de grossir les fonds propres d’une entreprise. » Illusion dangereuse, inefficacité garantie !

À la lecture de ce programme on comprend pourquoi il n’y a rien sur la fiscalité, c’est-à-dire sur les modalités de la redistribution des richesses entre le capital et le travail. François Asselineau est indifférent au partage de la valeur ajoutée et au fait que ces 30 dernières années le capital a bénéficié d’un surcroît de richesses au détriment du travail. Cet état de fait, source majeure de la crise économique et sociale, nécessite une inversion qu’il ne veut pas engager. Il choisit le capital au détriment du travail.

Rappelons encore le programme du CNR qui parle « d’exiger la confiscation des biens des traîtres et des trafiquants de marché noir, l’établissement d’un impôt progressif sur les bénéfices de guerre et plus généralement sur les gains réalisés au détriment du peuple et de la nation pendant la période d’occupation ainsi que la confiscation de tous les biens ennemis y compris les participations acquises depuis l’armistice par les gouvernements de l’axe et par leurs ressortissants, dans les entreprises françaises et coloniales de tout ordre, avec constitution de ces participations en patrimoine national inaliénable. » Rien de tel, adapté à notre époque, dans le programme de l’UPR. Pourtant il suffirait de remplacer les mots « guerre » et « marché noir » par « spéculateurs » et « bénéfices de guerre » par « profits issus de la crise » pour avoir un beau programme fiscal…

 

B.- Des points de convergence sur certains principes politiques fondamentaux

Sur certains principes politiques fondamentaux, il n’y a pas l’épaisseur d’un papier à cigarettes entre les propositions affichés par l’UPR et celles du Pardem. Ainsi, sur les libertés publiques, les droits de l’Homme et du citoyen, la laïcité, la probité, l’amitié et la solidarité entre les peuples, nous sommes en phase.

La Charte fondatrice de l’Union populaire républicaine, dans le passage qui suit, reprend exactement des principes politiques adoptés par le Pardem : « Proclamant son amour de la patrie et son rejet de tout nationalisme, l’UPR refuse évidemment tout extrémisme, tout racisme et tout communautarisme, et proclame son attachement à la laïcité et à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme adoptée par l’Assemblée Générale des Nations-Unies le 10 décembre 1948. »

Le point 5 du programme de François Asselineau, là encore, reprend des idées défendues par le Pardem : « Établir le respect de la personne humaine et l’égalité absolue de tous les citoyens devant la loi». Et il ajoute « Refuser la stigmatisation insidieuse des Français d’origine arabe ou de confession musulmane, comme la stigmatisation de tout Français en vertu de ses origines sociales ou ethniques ou bien de ses convictions politiques ou religieuses. »

En matière de libertés publiques, une nouvelle fois, le programme de Monsieur Asselineau demande la « fin du mandat d’arrêt européen », le « rétablissement du secret de la correspondance », la « garantie de la neutralité du web », l’ « Interdiction du puçage RFID des êtres humains », la « fin de l’État d’urgence », l’ « Interdiction du stockage des données des français hors de France ».

 

C.- Négligence totale des problèmes de l’environnement

En revanche, les questions de l’environnement sont gravement sous-estimées. Dans ce domaine de très rares propositions sont faites, qui n’auront qu’un effet très modeste sur l’environnement. Car François Asselineau refuse le protectionnisme et n’évoque pas le réchauffement climatique. Il y a néanmoins quelques bonnes idées :

  • « Réduction de la dépendance de l’économie aux hydrocarbures. »

  • « Arrêt des exportations des déchets dangereux. »

  • « Interdiction des OGM. »

  • « Diminution des antibiotiques dans l’agriculture. »

 

D.- Scandale absolu du vide du programme de François Asselineau concernant le chômage pour lequel il manifeste son indifférence

Cette indifférence est justifiée par Monsieur Asselineau dans une remarque hallucinante. Les questions de l’emploi, comme quelques autres, ne sont pas de son niveau, il renvoie vers le Premier ministre : « Que ce soit la fiscalité, l’emploi, les transports, la ville, les sports, les sujets de société, le tourisme, etc. Toutes ces compétences sont d’ordre gouvernemental et les choix résulteront des élections législatives. » Ah bon, l’emploi et le sport sur le même plan ! Et il ajoute : « Ce sont les raisons fondamentales pour lesquelles un programme présidentiel ne doit pas traiter de toutes les questions. Car nombre d’entre elles, même si elles sont importantes, ne relèvent pas de la stratégie à long terme de la nation mais d’un programme législatif de court ou moyen terme. » (Programme).

Rappelons, encore une fois, quelques éléments du programme du Conseil national de la Résistance : « la sécurité de l’emploi, la réglementation des conditions d’embauchage et de licenciement, le rétablissement des délégués d’atelier ». Aucun chômeur, aussi salarié ne peut voter pour quelqu’un qui tient des propos aussi scandaleux. S’il n’y avait qu’une seule raison de ne pas voter pour Monsieur Asselineau se serait celle-là. Car on comprend que la sortie de l’euro et de l’Union européenne ne sont que des gris-gris, une marotte pour François Asselineau, et non le moyen de résoudre les problèmes dramatiques auxquels se confrontent les Français.

La lutte contre le chômage, la mise en place d’un nouveau type de plein-emploi – ce devrait être évident pour tous – contrairement à ce qu’affirme François Asselineau, relève d’une stratégie de long terme. Le chômage de masse dure depuis plusieurs décennies. Ce n’est pas du long terme ? La sortie de l’euro et de l’Union européenne n’aura qu’un faible impact sur l’emploi si elle n’est pas accompagnée de la sortie de l’OMC. Elle ne peut pas être un but en soi comme le fait François Asselineau. Elle doit servir à relancer l’emploi. Quelle serait, pour les Français, la différence entre une France dans l’euro et une France en dehors de l’euro, mais toujours avec autant de chômage ?

 

François Asselineau croit que la seule sortie de la France de l'euro suffira à régler la question du chômage et qu'il n'y a pas grand chose d'autre à faire en la matière. Il s'apuie pour étayer sa croyance sur une étude publiée en septembre 2013 par des économistes. Intitulée « Les scenarii de dissolution de l’euro » elle a été rédigée par Jacques Sapir et Philippe Murer avec la contribution de Cédric Durand. Ils ont bâti un modèle qui fait l’hypothèse que les pays membres de l’Union européenne « s’accordent pour suspendre le fonctionnement de la monnaie unique et pour décider d’un retour aux monnaies nationales. La dévaluation est en réalité la méthode la plus simple, la plus rapide et la moins douloureuse de faire baisser le coût du travail sur le territoire français. » Ils font cette hypothèse car « des sorties individuelles (Grèce, Portugal, Espagne puis Italie et enfin France) plongeraient rapidement l’Europe dans le chaos en raison de leur nature non coordonnée. Certaines de ces sorties de la zone Euro s’accompagneraient d’un défaut unilatéral sur la dette pour ces pays et de mesures restrictives portant atteinte à la libre circulation des hommes et des biens. » Nous ne partageons pas cette affirmation. Il n'est pas du tout évident qu’une ou plusieurs sorties non coordonnées de l’euro suscitent le chaos. C'est d'ailleurs notre schéma politique et il semble que ce soit aussi celui de Monsieur Asselineau, même si ce dernier veut "négocier sereinement" avec les oligarques européens.

Cette « dissolution concertée de l’Euro » qu'évaluent ces économistes, avec pour la France un taux de change estimé à 1 Euro pour 1,0400 Dollar permet d’ « anticiper au minimum une réduction de 1,5 à deux millions de chômeurs dans les trois à quatre premières années ». Ce n'est pas rien !

Ce scénario se produira peut-être et les résultats qu’il donne sont intéressants. Mais il s’agit d’une réflexion d’économistes et non d’un projet politique. Dans la réalité, la probabilité la plus forte est celle d’une sortie unilatérale de la zone euro par tel ou tel pays. C’est sur cette question que l’étude aurait dû porter. Car cela entraîne des différences importantes avec le modèle théorique de ces économistes. La dévaluation du franc (ou de toute autre monnaie nationale) se fera donc de manière unilatérale au lieu d’être concertée. Il peut y avoir des mesures de rétorsions et des contre-mesures à ces dévaluations, que le Pardem intègre à son projet politique, ce que ne fait pas François Asselineau. Cela signifie qu’un projet très fort pour l’emploi doit absolument accompagner la sortie de l’euro, car autrement le gouvernement s’engageant dans cette démarche échouera à régler la question de l’emploi et n’aura jamais le soutien populaire. Ajoutons encore deux remarques. D’abord, le modèle de ces économistes fonctionne dans l’économie marchande, il n’intègre pas la création d’emplois dans le secteur non-marchand qui est l’élément essentiel d’ajustement dans notre projet. Ensuite, le modèle n’arrive qu’à des créations d’emplois évaluées entre 1,5 et 2 millions, contre la fin du chômage dans notre projet…

 

VI.- Une stratégie politique archaïque fondée sur l’homme providentiel

La stratégie de François Asselineau consiste à apparaître comme un homme providentiel, dénigrant les partis avec lesquels des convergences existent, au comportement prétentieux et arrogant, pour privilégier le ralliement à sa personne plutôt que l’alliance sur un programme. Son mouvement apparaît comme un club de supporteurs à sa personne et non comme un véritable parti politique. Ceci est en parfaite contradiction avec l’expérience du Conseil national de la Résistance dont il se réclame.

 

A.- Le choix contestable de privilégier l’élection présidentielle au détriment des législatives

Sa posture d’homme providentiel s’exprime par exemple dans ce commentaire : « L’élection présidentielle constitue l’élection décisive pour notre avenir collectif. » (Programme). Nous contestons cette appréciation. Les élections décisives sont et doivent rester les élections législatives. On a très bien pu se rendre compte, lors des périodes de cohabitation, que le pouvoir se situait bien chez le Premier ministre, émanation de la majorité législative, et non chez le président de la République.

Autre exemple : « Pour François Asselineau et pour le mouvement politique en plein essor qu’il a fondé le 25 mars 2007 – l’Union Populaire Républicaine –, le CNR n’a donc été rendu possible que grâce à la personnalité de Charles de Gaulle. » (Programme). Aucun historien ne soutiendra une thèse aussi rocambolesque. Si le Conseil national de la Résistance a été rendu possible, c’est d’abord grâce à l’existence de groupes de résistants issus des partis de la IIIe République, des syndicats et de réseaux spécifiques. C’est ensuite grâce à l’action de rassemblement du général de Gaulle, et non à sa « personnalité ». Si François Asselineau veut devenir le de Gaulle du XXIe siècle – ce qu’il n’est pas encore – il devra rassembler au lieu de dénigrer. Il a du travail…

 

B.- Un comportement prétentieux et arrogant

L’attitude de François Asselineau le conduit à refuser le débat d’idées et à considérer tous les autres comme moins que rien. Les exemples sont innombrables de remarques du type : je suis le seul à avoir dit ceci, je suis le premier à avoir fait cela, etc. Et dans la totalité des cas, nous l’avons vérifié, c’est faux !

Quelques exemples :

  • « L’une des raisons essentielles de la création de l’UPR réside dans le constat que tous les mouvements politiques se réclamant de la souveraineté nationale affichent des programmes doublement ambigus : d’une part, ils font de la souveraineté un sujet parmi d’autres. Or noyer la question européenne dans de nombreux autres sujets, c’est faire perdre de vue le caractère central, spécifique et décisif du nécessaire rétablissement de notre souveraineté nationale ; d’autre part, ils reprennent à leur compte le mythe de la construction européenne amendable. » (Charte fondatrice) Cette remarque est particulièrement inexacte, car outre le Pardem, et ceci bien avant la création de l’UPR, d’autres organisations luttaient pour la souveraineté : le PRCF, le POI (ex-PT). François Asselineau devrait témoigner de beaucoup plus de modestie car il a une conception étriquée de la souveraineté qui ne se réduit qu’à l’euro, à l’Union européenne et à l’OTAN. Elle n’inclut pas les autres institutions supranationales ni le domaine de l’économie et le contrôle de nos grandes entreprises stratégiques.

  • « En pratique, l’UPR est le seul mouvement politique à proposer – et à inscrire dans ses statuts – qu’il n’est possible de commencer à redresser la France que sur la base de trois orientations essentielles : 1) dénoncer tous les traités européens, y compris le traité de Rome, 2) refuser le concept même de ‘’construction européenne’’, avec ses sempiternelles promesses ‘’d’autre Europe’, 3) inscrire dans la Constitution française l’interdiction de toute délégation de souveraineté qui ne serait pas bornée à des sujets très précis, limités dans le temps et dans leur objet, et régis par des traités internationaux fondés sur la réciprocité et l’égalité entre États. » Tout ceci est totalement faux, nous venons de le montrer.

  • « Notre programme est le seul juste pour la France. » (Programme) Quelle prétention ! Le programme de Monsieur Asselineau est très loin de ce qu’il est nécessaire pour résoudre vraiment les problèmes de la France.

  • « Les dirigeants des autres partis politiques, qui changent de programme comme de chemise et qui éludent systématiquement la question de la souveraineté nationale, n’osent jamais, eux, représenter les programmes trompeurs et mensongers qu’ils avaient présentés aux Français en 2012. » (Programme) Encore faux !

  • « Les programmes de tous les autres partis politiques seront incapables de lutter, si peu que ce soit, contre les délocalisations puisqu’ils refusent de sortir de l’Union européenne. » (Programme) Faux ! Le Pardem a élaboré une proposition de loi antidélocalisations et propose non seulement de sortir de l’euro et de l’UE, mais aussi de l’OMC à laquelle François Asselineau veut que la France retourne.

 

C.- Finalement, François Asselineau veut rallier à lui mais ne cherche pas d’alliés

À l’époque du MPEP (Mouvement politique d’émancipation populaire qui s’est fondu dans le Pardem), nous avons recherché une alliance avec l’UPR dans l’esprit du Conseil national de la Résistance. Nous étions plusieurs organisations, comme le Pôle de renaissance communiste en France (PRCF), les Clubs Penser la France, le Front syndical de classe. Nous avons même fait meeting commun à Aix-en-Provence le 3 novembre 2012, voir la vidéo des interventions de François Asselineau (UPR), Georges Gastaud (PRCF), Jacques Nikonoff (M’PEP), Jacky Omer (Front syndical de classe), Jean-Luc Pujo (Clubs Penser la France) et une contribution de Léon Landini (ancien résistant FTP-MOI). Monsieur Asselineau a préféré rompre les discussions en cours et faire cavalier seul.

http://www.m-pep.org/Videos-Reunion-publique-a-Aix-en

 

D.- L’UPR n’est pas un vrai parti, c’est le club de supporteurs de François Asselineau

D’ailleurs, sur des sujets clés, il se refuse à donner son point de vue. Il préfère botter en touche en proposant des référendums sur :

  • « la politique énergétique de la France.
  • la dette publique.
  • l’immigration. »

Monsieur Asselineau n’a pas d’idées sur ces sujets ? Il ne veut pas en débattre avec les citoyens ? En vérité il n’a pas le courage politique d’affirmer des choix. Pour justifier que des sujets importants ne sont pas abordés dans son programme, il explique la chose incroyable suivante : « Que ce soit la fiscalité, l’emploi, les transports, la ville, les sports, les sujets de société, le tourisme, etc. Toutes ces compétences sont d’ordre gouvernemental et les choix résulteront des élections législatives. » Ah bon ! La question de l’emploi, qui constitue depuis trois décennies la principale préoccupation de nos compatriotes n’est pas du niveau du président de la République ?

Et il ajoute : « Ce sont les raisons fondamentales pour lesquelles un programme présidentiel ne doit pas traiter de toutes les questions. Car nombre d’entre elles, même si elles sont importantes, ne relèvent pas de la stratégie à long terme de la nation mais d’un programme législatif de court ou moyen terme. » (Programme) Non, François Asselineau, la fiscalité qui contribue pour l’essentiel au partage de la valeur ajoutée entre le capital et le travail, comme l’emploi, qui est le mal fondamental de la société française, sont des stratégies de long terme. Elles sont même l’essentiel, car pour nous sortir de l’ordre néolibéral mondial, et donc de l’euro et de l’UE, doit servir à améliorer significativement la vie du peuple, ce qui passe impérativement par le plein-emploi. Sinon, à quoi bon ?

 

VII.- L’erreur stratégique majeure de vouloir utiliser l’article 50 du traité de Lisbonne pour sortir de l’UE, la confusion entre le BREXIT et le FREXIT

François Asselineau se trompe lourdement en voulant utiliser l’article 50. Si la procédure juridique qu’il évoque peut être utilisée par les Britanniques pour sortir de l’Union européenne, elle est en revanche totalement inadéquate pour sortir la France de l’euro. Sortir de l’Union européenne (sans l’euro) et sortir de l’euro sont des opérations très différentes.

 

A.- L’obsession de l’article 50

L’usage de l’article 50 du traité de Lisbonne (TUE), pour sortir de l’Union européenne et donc de l’euro est une grave erreur. Voilà ce que dit le programme de Monsieur Asselineau : « Reconquérir l’indépendance politique de la France en sortant unilatéralement et juridiquement de l’Union européenne par la mise en œuvre de l’article 50 du traité sur l’Union européenne (TUE). » (Programme). Nous aussi, jusqu’en 2010, avons cru que l’article 50 était une option solide à utiliser. Nous sommes pourtant parvenus au constat que la sortie de l’Union européenne en utilisant l’article 50 était non seulement illusoire, mais qu’elle était extrêmement dangereuse.

Le programme de François Asselineau fait ce commentaire surprenant à propos de l’article 50 : « L’existence   même   de   cet   article   prouve   que reprendre   notre   indépendance   est   possible   - puisque c’est prévu - et que cela peut se faire sans drame - puisque cet article prévoit un processus de négociation serein avec les autres partenaires. » (Programme).

Attention à la naïveté ! Même s’il n’y aura peut-être pas de « drame » dans le processus de restauration de notre souveraineté nationale, celui-ci ne résultera certainement pas d’un « processus de négociation serein ». D’ailleurs nous récusons cette notion de « négociation », car la souveraineté de la France, encore une fois, ne se négocie pas. Il faut bien comprendre que les classes dominantes de la triade, avec la mise en place des institutions supranationales comme l’Union européenne, sont prêtes à tout pour conserver leur système.

D’ailleurs, posons-nous la question suivante : s’il n’y avait pas cet article 50 dans le traité de Lisbonne, comment feraient les pays qui voudraient en sortir ? Ils ne sortiraient au motif qu’aucun moyen juridique n’est prévu ? Ils prendraient tout simplement une décision unilatérale de retrait. Point !

Les dignitaires de l’UE ont dit à plusieurs reprises que les pays membres de la zone euro y étaient pour toujours. Il faut donc éviter la moindre naïveté et préparer dès à présent nos concitoyens à des épreuves qui ne pourront pas être « sereines ». L’angélisme, le juridisme, la naïveté, réels ou simulés, constituent une très grave faute politique. La voie juridique de l’article 50, ce miroir aux alouettes, est une impasse politique aux conséquences désastreuses. C’est une fausse bonne idée.

 

B.- Il faut au contraire sortir vite en créant un état de fait, on ne peut pas comparer le FREXIT et le BREXIT

Charles de Gaulle, dans C’était de Gaulle, tome 2, d’Alain Peyrefitte, écrit que « C’est de la rigolade ! Vous avez déjà vu un grand pays s’engager à rester couillonné, sous prétexte qu’un traité n’a rien prévu au cas où il serait couillonné ? Non. Quand on est couillonné, on dit : "Je suis couillonné. Eh bien, voilà, je fous le camp ! Ce sont des histoires de juristes et de diplomates, tout ça" ». Nous sommes entièrement d’accord avec cette remarque frappée au coin du bon sens.

La sortie de la France de l’Union européenne ne se fera surtout pas au moyen de l’article 50 du traité de Lisbonne. Elle devra être rapide et unilatérale, autrement dit la France décidera, seule, de sortir. Son geste, à n’en pas douter, provoquera une réaction en chaîne souhaitable, incitant les peuples des autres pays à se mobiliser pour retrouver leur liberté. La sortie de l’Union européenne s’accompagnera d’un référendum pour réviser la Constitution française afin d’en éliminer tous les articles qui placent le droit français sous la tutelle du droit communautaire européen, particulièrement ceux contenus dans le titre XV intitulé « De l’Union européenne ». La tragédie grecque démontre qu’aucune négociation n’est possible avec les représentants de l’Union européenne.

L’utilisation de l’article 50 constitue une grave diversion ne pouvant aboutir qu’à l’enlisement du processus de retrait et à la démobilisation de la population. La sortie de l’Union européenne et de l’euro doit au contraire se faire par une décision unilatérale d’un pays, en créant une situation de fait, démarche qui ressemble à la politique de la « chaise vide » menée par le Général de Gaulle entre juin 1965 et janvier 1966.

 

C.- Respecter la parole du peuple

L’UPR explique qu’il faut utiliser l’article 50 du Traité de Lisbonne qui permet de sortir légalement de l’Union européenne. ne pas le faire reviendrait à ne pas respecter la parole de la France, notre pays ayant ratifié ce Traité. Mais c’est exactement le contraire ! Ce serait en activant l’article 50 que la souveraineté du peuple français serait bafouée ! En effet, le Traité de Lisbonne est illégitime depuis 2005.

Il ne faudrait quand même pas oublier que le peuple français, le 29 mai 2005, à 55 %, a dit NON au Traité constitutionnel européen. Or le Traité de Lisbonne n’est qu’un résumé du Traité constitutionnel européen. En outre, le Traité de Lisbonne a été ratifié par la France à la suite d’un coup d’État parlementaire. Le Congrès (réunion de l’Assemblée nationale et du Sénat) a d’abord révisé la Constitution française le 4 février 2008 pour introduire un Titre XV intitulé « De l’Union européenne » qui fait de l’appartenance à l’Union européenne, en citant le Traité de Lisbonne, une obligation constitutionnelle. Puis, le 8 février, le Congrès (PS, droite, verts) a ratifié le Traité de Lisbonne, passant outre le vote du peuple lors du référendum.

Si nos concitoyens votent pour la sortie de l’Union européenne et donc de l’euro, la France aura toute légitimité pour en sortir par un acte unilatéral, sans passer par l’article 50. Ajoutons que le mandat politique donné à la nouvelle majorité imposera qu’elle le respecte, ce qui est incompatible avec le recours à l’article 50. Ajoutons encore que le vote du peuple français pour une majorité ayant proposé la sortie de l’Union européenne ne demande aucune démarche supplémentaire, cet acte politique suffit.

 

D.- La sortie par l’article 50 est illusoire

C’est un parcours du combattant organisé pour empêcher toute sortie de l’UE ou une sortie dans de mauvaises conditions. Une lecture attentive de l’article 50, éclairée par l’expérience grecque, montre le caractère parfaitement illusoire de l’utilisation de l’article 50. Qu’on en juge puisque le processus de négociation dépend uniquement du bon vouloir du Conseil européen. L’alinéa 2 de l’article 50 stipule que « l’Union négocie et conclut avec cet État [celui qui veut sortir de l’UE] un accord fixant les modalités de son retrait ». Pour nous, la souveraineté d’un État ne peut se « négocier ». Certes, il est évident que des discussions doivent s’engager entre l’État qui veut sortir de l’UE et les représentants de l’UE au niveau du Conseil. Mais en aucun cas il ne peut s’agir de « négociations », ce ne peut être que des discussions, pouvant déboucher – ou non – sur un protocole d’accord. Si aucun « accord » n’est trouvé, l’État voulant sortir sera bien obligé de prendre une décision. Par conséquent, autant prendre cette décision le plus vite possible afin d’éviter d’entrer dans le processus de l’article 50.

En outre, cet « accord » doit être « négocié » conformément à l’article 188 N, paragraphe 3 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Ce dernier prévoit que « la Commission […] présente des recommandations au Conseil, qui adopte une décision autorisant l’ouverture des négociations. » Autrement dit, le Conseil peut décider de ne pas ouvrir de « négociations ». C’est une raison supplémentaire pour se passer de son avis et indiquer au Conseil, si ce dernier tarde ou refuse d’ouvrir ces « négociations » ou les retarde, les conditions mises par l’État sortant.

Il faut « l’approbation du Parlement européen ». Si le Parlement européen vote pour la sortie de l’État demandeur (dans quels délais ?), il ouvre la voie à la décision du Conseil. Mais s’il vote contre, que va-t-il se passer ? Une nouvelle fois, le plus simple est de ne pas entrer dans ce garrot et de prendre une décision unilatérale.

En outre le Conseil doit statuer à la majorité qualifiée. Celle-ci est définie par l’article 205 du TFUE, paragraphe 3, point b, qui stipule : « la majorité qualifiée se définit comme étant égale à au moins 72% des membres du Conseil représentant les États membres participants, réunissant au moins 65% de la population de ces États. » Ainsi, une majorité « qualifiée » peut refuser la sortie d’un État souverain qui le demande, ou lui proposer des conditions inacceptables. Là encore le plus simple est de ne pas mettre le doigt dans cet engrenage.

Les délais peuvent atteindre deux ans ! Le délai commence à partir de la « notification » de l’État au Conseil. Mais en deux ans il peut se passer beaucoup de choses, notamment des tentatives de déstabilisation du gouvernement qui s’engagerait dans cette voie.

Des « négociations » qui excluent le pays demandeur ! Il est en effet indiqué que l’État qui demande à bénéficier de l’article 50 « ne participe ni aux délibérations ni aux décisions du Conseil qui le concernent ». C’est cela que le Traité de Lisbonne appelle des « négociations » ! Et c’est à cette mascarade que nous avons cru jusqu’à aujourd’hui.

 

E.- Utiliser l’article 50 est extrêmement dangereux et même fatal

Ces fausses « négociations » placent le pays voulant sortir en position de faiblesse. Le pays qui voudrait sortir par l’article 50 se mettrait lui-même en position de faiblesse au cours de « négociations » jouées d’avance, qui reviennent à se mettre la tête dans la gueule du loup. C’est offrir aux européistes de tous poils le temps de mettre la pagaille dans le pays sortant. L’exemple de la Grèce au cours de l’année 2015 doit être médité. Si le Premier ministre Tsipras a capitulé, c’est aussi à la suite des pressions énormes exercées par les oligarques européens et leurs relais en Grèce : grand patronat, grands médias, certains syndicats…

Les conditions mises par l’article 50 sont telles, qu’elles sont de nature à empêcher toute réaction immédiate de l’État concerné à des attaques des marchés financiers ou à des troubles organisés par les classes dirigeantes.

Ce serait étaler une profonde incohérence politique. Un gouvernement qui s’engagerait dans cette voie serait un gouvernement à 60%, avec un président de la République qui accepterait de sacrifier 40% de son mandat (2 années sur 5) au nom du respect de la signature de la France d’un traité dont il veut pourtant se débarrasser. Où est la cohérence de cette position qui consiste à respecter à 100% les traités européens pendant les deux années de la « négociation », pour pouvoir ensuite en sortir totalement, mais uniquement passé ce délai ? C’est une attitude totalement incompréhensible pour la population à qui on expliquerait qu’elle doit attendre deux ans pour voir appliquer le programme pour lequel elle a voté. C’est même franchement ridicule et suicidaire. L’article 50 vise en réalité à engluer dans des procédures juridiques interminables et incompréhensibles pour la majorité de la population, les États qui voudraient sortir de l’UE.

 

Conclusion

Au total nous n’appellerons pas à voter pour François Asselineau car il n’est pas porteur d’une dynamique politique susceptible de gagner.

À aucun moment il ne fait un diagnostic précis et rigoureux des malheurs de la France, qui ont les mêmes causes que les malheurs des pays membres de l’Union européenne et de la plupart des autres pays à l’échelle planétaire : la mondialisation néolibérale et la domination de l’hyperclasse.

À aucun moment il ne se fixe pour but de sortir de la mondialisation néolibérale. Il ne comprend pas que l’enjeu principal est l’attaque simultanée et frontale des trois piliers du piège néolibéral, par la sortie immédiate du libre-échange, le démantèlement tout aussi immédiat de la financiarisation de l’économie et des budgets publics, et la sortie sans le moindre délai de tous les traités internationaux néolibéraux et des institutions correspondantes. Et ce dès l’arrivée au pouvoir, en ayant axé la campagne sur cet objectif : retour immédiat au franc, annulation de la dette publique, nationalisation du secteur bancaire, suppression immédiate de la liberté de circulation des capitaux, etc.

La méthode de François Asselineau est forcément perdante et nous promet une gigantesque confusion politique, économique, sociale, juridique. Ce serait le retour de l’impasse de 1981-1982 avec François Mitterrand, celle de la fausse rupture alors qu’une majorité du peuple a cru l’inverse. Ce serait la trahison de cet espoir, et donc une situation pire pour redresser la barre.

Dans ce contexte, se contenter de voter pour un candidat qui reprend nôtre programme, sur tel ou tel point, même essentiel, sans se préoccuper de ce qui garantit le succès ou l’échec de la rupture nécessaire à accomplir, serait un acte d’irresponsabilité que nous ne voulons pas commettre.

C’est pourquoi faire grandir le Pardem est bien pour l’instant la seule voie pour construire une dynamique de rupture gagnante contre la mondialisation néolibérale et son piège systémique redoutable qu’elle a dressé contre toute possibilité de retour en arrière.

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